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Violences envers des dirigeants de TPE/PME : une nouvelle cellule d'accompagnement
Les violences faites aux personnes exerçant en profession libérale, aux commerçants et dirigeants de PME et TPE sont souvent médiatisées mais cette réalité dramatique est surtout abordée sous l’angle sécuritaire. C’est sous le prisme de la santé que l’observatoire Amarok a mis en place une cellule expérimentale d’accompagnement dans l’Hérault et le Gard.
1,48 million d’« atteintes aux biens » ont été enregistrées par la police nationale en France métropolitaine de septembre 2014 à août 2015 dont 1,17 million de vols sans violence et 96 919 vols avec violences, selon les chiffres officiels des pouvoirs publics (1). Dans les vols avec violence, 1 764 « vols à main armée contre des établissements industriels ou commerciaux » ont été déclarés, 88 326 « vols violents sans armes », et 9 417 « menaces ou chantages pour extorsion de fonds » recensées. Certes, ce panorama de la délinquance, très général, ne permet pas de connaître le nombre de violences faites aux commerçants, dirigeants de PME/TPE ou professions libérales. Mais les faits divers regorgent de cambriolages ou d’agressions, par exemple de médecins ou d’infirmières dans l’exercice de leurs activités professionnelles : comparés aux chiffres officiels, on peut supposer qu’ils ne sont pas qu’anecdotiques.
« Un travailleur non salarié braqué non soigné est une bombe à retardement »
« Chaque jour, des commerçants, des artisans, des agriculteurs, se font braquer ou sont victimes d’agressions, parfois dans des conditions particulièrement violentes. Certains braquages peuvent aller jusqu’à causer la mort, ici du commerçant, là d’un client, parfois des forces de police qui viennent s’interposer ou des braqueurs eux-mêmes comme ce fut le cas récemment à Nice. Les bijouteries et les tabacs sont si exposés que leurs fédérations organisent régulièrement des séances d’information sur le sujet. Tous les lieux de travail sont susceptibles de faire l’objet d’un braquage », souligne le professeur Olivier Torrès (2), professeur à l’université de Montpellier et président d’Amarok, observatoire de la santé des indépendants. « Un travailleur non salarié braqué non soigné est une bombe à retardement », analyse-t-il. Certes, les assurances ont des protocoles juridiques qui permettent de se faire rembourser. Des démarches administratives peuvent donner à ces victimes, en cas d’arrêt de travail, la possibilité de bénéficier d’indemnités journalières. Pourtant, en cas de violences, le traumatisme subi et ses répercussions sur les chefs d’entreprise ne sont pas pris en compte : insomnies, nervosité, tremblements, état dépressif, ulcères peuvent conduire la victime au suicide. Ou à un autre statut : celui de criminel potentiel lorsqu’il se dote d’une arme. « Ce réflexe d’autodéfense correspond à son état d’esprit indépendant mais répond à l’insécurité par une autre insécurité, celle de la victime excédée qui se révolte et commet l’irréparable en tuant l’agresseur », poursuit Olivier Torrès. Or, les « cellules psychologiques » sont aujourd’hui reconnues pour aider les personnes victimes de violences et pour soigner le stress post-traumatique. Mais elles n’ont pas été intégrées dans une réflexion exhaustive sur les violences exercées envers toutes les personnes dans l’exercice de leur métier.
Un numéro vert et un suivi psychologique
« De manière générale, les politiques de prévention en matière de braquage et violence se déclinent toutes en prévention sécuritaire destinées à éviter l’événement ou à mieux s’y préparer », constate Olivier Torrès. Mais il faut se rendre à l’évidence : le « risque zéro » n’existe pas, le « tout sécurité » ne mettra jamais définitivement à l’abri d’une entreprise criminelle (97 029 « violences physiques crapuleuses » recensées sur un an (1)). Pour Olivier Torrès, « une politique de prévention complète repose donc sur deux piliers : la sécurité et le soin ». Deux cellules de coordination et d’accompagnement pour les artisans, commerçants, professions libérales et exploitants agricoles, victimes de braquages, agressions ou violences sont désormais mises en place dans l’Hérault et dans le Gard sous l’égide d’Amarok, avec le soutien de plusieurs organismes consulaires. Le Régime Social des Indépendants (RSI) le finance à hauteur de 15 000 euros. Ce dispositif gratuit sera expérimenté pendant douze mois. Fin 2016, les conclusions permettront d’envisager la pérennisation ou non d’une telle structure. La cellule peut être contactée par un numéro vert (3). L’ indépendant sera mis en relation avec le service d’intervention de l’Observatoire Amarok http://www.observatoire-amarok.net/fr qui lui proposera de le rencontrer directement. Si une urgence psychologique est détectée, il lui sera alors immédiatement proposé d’être mis en relation avec une psychologue clinicienne afin de débuter un suivi thérapeutique de trois séances. « On n’a jamais théorisé la santé patronale », déplore le professeur Torrès. Les résultats des deux cellules d’accompagnement permettront de combler ce manque et peut-être de susciter d’autres initiatives.
- Bulletin mensuel de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, septembre 2015.
- Il est aussi professeur à Montpellier Business School, titulaire de la chaire « Santé des dirigeants de PME » du Labex Entreprendre et auteur de nombreux ouvrages sur les PME.
- Numéro vert : 0800 501 201
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