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Un intéressement à ne pas substituer à du salaire
Même si l'intéressement s'insère dans la politique salariale de l'entreprise, il doit être différencié de la rémunération proprement dite. Les sommes versées au titre de l'intéressement ne sont en effet pas considérées comme du salaire et ne donnent lieu ni à cotisations sociales, ni, si elles sont placées à impôt. Supprimer un élément de salaire et le remplacer par de l'intéressement est, sous certaines réserves, interdit.
Un principe fort…
Le principe de non-substitution à un élément de rémunération se justifie par deux raisons majeures :
- la nécessité de protéger les intérêts du salarié, l’élément de salaire remplacé pouvant être « fixe et certain » (prime de 13e mois par exemple) alors que l’intéressement est, par nature, aléatoire ;
- éviter que l’employeur n’échappe au versement de cotisations sociales en « transformant » en intéressement (et en bénéficiant donc de l’exonération associée) des sommes qui étaient initialement soumises à cotisations sociales.
… mais limité à 12 mois
L’impératif de protection des salariés (et des comptes des organismes de sécurité sociale!) ne doit pas non plus empêcher l’entreprise d’adapter sa politique salariale en fonction de ses propres contraintes et évolutions. C’est pourquoi le principe de non-substitution est limité dans le temps : 12 mois entre le dernier versement de l’élément de rémunération supprimé et la date d’effet de l’accord d’intéressement.
Remarque : La date d’effet de l’accord correspond au début de l’exercice de référence pour le calcul de la prime. Par exemple, si un élément de rémunération cesse d’être versé au 31 décembre 2013, le principe de non-substitution pourra être invoqué si un accord est signé avant le 1er janvier 2015, même si en pratique la prime qu’il prévoit est versée beaucoup plus tard.
En revanche, la démarche inverse, à savoir substituer du salaire à de l’intéressement, est possible dans la mesure où elle favorise le salarié, l’aléatoire devenant certain.
Les sommes versées au titre de l’intéressement (et d’un éventuel supplément d’intéressement) ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération versés par l’entreprise. On entend par là toutes les sommes entrant dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale. Il s’agit des sommes versées en contrepartie du travail ou liée à l’exécution de celui-ci (salaire, indemnités compensant une sujétion particulière…), y compris les primes régulières (13e mois) ou occasionnelles, aléatoires ou bénévoles versées par l’employeur (prime de fin d’année par exemple) et le revenu professionnel non salarié soumis à cotisations des chefs d’entreprise ou assimilés qui bénéficient de l’accord d’intéressement.
Remarque : Le principe de non-substitution vaut aussi bien lorsque l’intéressement versé remplace en totalité un élément de rémunération que lorsqu’il ne le remplace que partiellement. Par exemple, réduire le montant d’une prime et compenser cette réduction par l’intéressement versé revient bien à enfreindre le principe de non-substitution.
Le principe de non-substitution s’avère d’application particulièrement stricte et doit être respecté en toutes circonstances : il doit notamment l’être par l’entreprise mettant en place une « prime relais » en faveur de ses salariés, lorsqu’un premier accord d’intéressement est arrivé à terme et dans l’attente qu’un nouvel accord soit conclu. Cette « prime relais » est considérée comme un élément de rémunération : le principe de non-substitution n’est pas respecté si elle est supprimée (ou réduite) moins de 12 mois avant la prise d’effet du second accord d’intéressement.
Requalification de l’intéressement en salaire
Si la substitution a lieu moins de 12 mois suivant la suppression ou la réduction de l’élément de rémunération, l’intéressement peut être requalifié d’office en salaire par les services fiscaux et les organismes de recouvrement des cotisations sociales.
Remarque : Le principe de non-substitution doit bien évidemment être respecté au cours de l’application de l’accord. Si un accord est conclu pour 3 ans et qu’au cours de son application, un élément de salaire est réduit ou supprimé et réinjecté dans l’accord d’intéressement, les primes d’intéressement versées après cette réduction ou suppression seront bien réintégrées dans l’assiette des cotisations et des taxes et participations sur les salaires. Si le salarié a affecté ces sommes sur un plan d’épargne entreprise, celles-ci seront réintégrées dans l’assiette de l’impôt sur le revenu.
Lors de ses contrôles en entreprise, l’Urssaf est particulièrement sensible au principe de non-substitution. Si elle constate que les règles n’en sont pas respectées, elle redresse l’employeur et réintègre l’intéressement versé dans l’assiette des cotisations dues.
Ampleur du redressement
Pour la jurisprudence, en cas de non-respect du principe de non-substitution, la totalité de l’intéressement versé doit être réintégrée dans l’assiette des cotisations fiscales et sociales.
Ceci vaut même si l’élément de salaire supprimé était inférieur au montant de cet intéressement.
En revanche, le droit aux exonérations sociales et fiscales applicable à l’intéressement est rouvert sans délai si l’entreprise rétablit les éléments de salaire réduits ou supprimés.
Action offerte aux salariés
Lorsqu’un accord d’intéressement est conclu simultanément à un accord prévoyant la suppression d’un élément de rémunération, il y a bien substitution de l’intéressement à cet élément de rémunération. L’accord sera alors invalidé par la Direccte.S’il n’est pas valide, l’accord initial qu’il est censé remplacer l’est toujours. Un salarié pourrait donc très bien engager une action en rappel de salaire pour « récupérer » les sommes dont il a indûment été privé.
Remarque : En contrepartie, si l’employeur a déjà versé une prime d’intéressement sur la base d’un accord illicite, il peut en demander la restitution aux salariés qui l’ont perçue.
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