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Le passage au CSE inquiète les ¾ des élus du personnel
Selon une enquête de l’Ifop pour Syndex, 75 % des élus du personnel interrogés appréhendent le passage au CSE qui remplace dans une instance unique les CE, CHST et DP. Ils auraient le sentiment de devoir « faire plus avec moins », une réduction des moyens anticipée dont le premier impacté ne serait autre que le dialogue social.
Fin 2018, la première note d’étape du comité d’évaluation des ordonnances Travail relevait « l’approche avant tout très défensive » des représentants des salariés. Une appréhension qui se confirme un mois plus tard par l’enquête « Les élus du personnel et la mise en place du CSE dans les entreprises »[1] réalisée par l’Ifop pour le cabinet d’expertise Syndex.
Pour rappel, le CSE n’est pas obligatoire pour les entreprises comptant moins de 11 salariés. En revanche, il s’agit d’un passage obligé à partir de 11 salariés. Le CSE de ces PME doit être mis en place d’ici le 1er janvier 2020, il exercera les mêmes pouvoirs que les anciennes instances.
Le passage au CSE accentuerait la dégradation du dialogue social
Les ordonnances Travail devaient renforcer et simplifier le dialogue social, ou du moins devaient-elles être perçues comme telles. Or, au lieu de rassurer les élus, le passage au CSE les inquiète : 60 % des élus du personnel craignent que celui-ci dégrade le dialogue social.
« Les représentants des salariés […] se sentent en situation de faiblesse face à des directions jugées peu ouvertes au dialogue », remarque l’Ifop. 78 % des élus passés au CSE estiment que les directions sont les grandes gagnantes de cette réforme.
Si 75 % des élus du personnel se disent être « inquiets », 72 % jugent la direction « opportuniste ». Les représentants des salariés pressentent un rapport de force déséquilibré entre les élus et les dirigeants (41 %).
Pour autant, ce sombre présage n’est pas entièrement partagé par les élus des PME de moins de 50 salariés, pour lesquels la direction est davantage « ouverte » et « à l’écoute » que pour leurs pairs. D’ailleurs, au sein de ces PME, la qualité du dialogue social est mieux évaluée par les élus (moyenne de 6,5/10) que par l’ensemble du panel (moyenne de 5,1/10).
Enfin, jointe à la crainte, l’espoir n’est pas perdu. L’ensemble des élus interrogés espèrent que le CSE permettra « l’émergence d’une nouvelle dynamique dans le dialogue social » (36 % pour l’ensemble du panel et 44 % pour les élus des PME comptant moins de 50 salariés). Un espoir difficile à concilier avec la perte des moyens annoncés.
Le passage au CSE : vers un affaiblissement des moyens des élus ?
La majorité les élus du personnel sondés redoutent une perte de leur capacité d’action. Principal motif de préoccupation : la diminution des moyens alloués aux élus (41 %). Ils auraient le sentiment d’une « pure perte », de devoir « faire plus avec moins », indique l’Ifop.
Les premières revendications portées lors des négociations le prouvent : 46 % des élus défendent le nombre d’heures de délégation, 45 % d’entre eux souhaitent permettre aux suppléants d’assister aux réunions et 40 % des représentants entendent revoir l’organisation et les moyens de consultation du CSE.
Et l’épreuve de la réalité ne contredit pas les craintes. En effet, le diagnostic avant/après le passage au CSE est éloquent. D’après l’enquête, l’instance unique aurait causé une baisse du nombre d’élus de 33 % et une baisse du nombre d’heures de délégation pour les représentants de 43 % au sein des entreprises qui ont déjà sauté le pas.
Matthieu Barry
[1] Cette étude a été menée auprès d’un échantillon de 1147 élus du personnel français et les interviews ont été réalisées par questionnaire auto-administré en ligne du 16 novembre au 7 décembre 2018.
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