Interview
Jean-Philippe Guiot, associé cofondateur d’Exagame
A 23 ans, Jean-Philippe Guiot, ingénieur de formation, est directeur délégué d’Exagame, un éditeur de jeux en ligne caractérisé par une stratégie de développement bien différente de celle de ses concurrents.
Quel est votre parcours ?
Jean-Philippe Guiot: Je suis ingénieur de formation diplômé de l’EPITECH, une école d’informatique, et titulaire d’un MBA TIC E-Business de l’ESG. Au cours de mes études, j’ai aussi fait de nombreux stages en entreprise, totalisant 3,5 ans d’expérience professionnelle.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de créer, si jeune, une entreprise ?
D’abord mon caractère : j’aime bâtir, construire et c’est ainsi que je vois la création d’entreprise : réunir une équipe pour créer et développer des projets. C’est aussi le résultat d’une opportunité : lors d’un stage dans une SSII, je me suis bien entendu avec le PDG et nous avons eu envie de créer une société ensemble. C’est ainsi qu’est née Exagame.
Quelle est l’activité d’Exagame ?
Exagame est un éditeur de jeux vidéo accessibles gratuitement sur Internet, à partir d’un simple navigateur. Personnellement, je fais partie de la génération des jeux vidéo, c’est un domaine qui me plaît. Mais nous avons aussi choisi ce créneau parce que c’est un marché porteur, riche en opportunités. En revanche, nous avons renoncé à créer un jeu ex nihilo, car cela aurait pris trop de temps pour constituer une forte communauté. Grâce à une première levée de fonds auprès d’investisseurs privés, nous avons racheté deux jeux existants sur un marché qui se professionnalise, BébéVallée et Anizoo, pour les développer et leur ajouter du contenu éditorial.
Qu’entendez-vous par « ajouter du contenu à un jeu vidéo » ?
Notre stratégie est d’offrir du contenu en lien avec le jeu proposé. Par exemple, pour BébéVallée (un jeu autour de la thématique du bébé), nous apportons de l’information et des conseils pratiques pour les futures et jeunes mamans sur la grossesse, la maternité, l’enfance, … Pour Anizoo (gestion d’un zoo virtuel), le contenu concerne les animaux, la nature et la protection de l’environnement. Associer le côté ludique à une démarche informative et éducative permet de toucher une cible plus large. Nous nous efforçons aussi de faire évoluer nos jeux en permanence : c’est indispensable pour éviter de lasser notre public, très jeune.
Vos jeux sont gratuits : quel est votre modèle économique ?
Nous nous rémunérons via la publicité sur nos sites et par le système des micropaiements. Pour jouer de façon plus personnalisée, il est possible d’acheter des « objets virtuels » ou d’augmenter son portefeuille de monnaie, également virtuelle, via des micropaiements (SMS, audiotel) qui nous apportent du chiffre d’affaires. Ce modèle fonctionne bien : avec moins d’un an d’existence, nous sommes déjà bénéficiaires. Cela s’explique aussi par des coûts de structure très légers : Exagame n’a que trois salariés pour l’instant, travaille beaucoup en sous-traitance avec un réseau d’indépendants et fonctionne sans véritables locaux, hormis notre siège social…
Vous n’avez pas de locaux ? Exagame est une entreprise aussi virtuelle que ses produits !
Oui, dans son mode de fonctionnement ! Nous travaillons chacun chez nous et communiquons par mail ou via Skype. Nous nous réunissons physiquement deux fois par mois seulement. Cela suffit pour un fonctionnement optimal d’Exagame.
Quels sont vos projets de développement ?
Pour l’instant, il s’agit de focaliser toute notre énergie sur ces deux sites qui génèrent plus de 800.000 visites chaque mois et de développer à la fois le volet éditorial, communautaire et jeu. Si nos deux sites sont actuellement francophones, nous visons à moyen terme un développement international.
Le quotidien d’un entrepreneur correspond-il à ce que vous imaginiez ?
C’est à la fois une grande joie mais aussi beaucoup de difficultés. Il faut prendre les bonnes décisions au bon moment, choisir les bons fournisseurs… Et au moindre problème, on est seul pour faire face. L’entrepreneur doit être toujours sur le pont dans un univers qui fonctionne 7/7 j et 24/24h. Les vacances sans connexion Internet, je me les interdis ! C’est vrai que je sens un certain décalage par rapport à mes copains salariés, qui ne comprennent pas toujours l’ordre de mes priorités.
Vous avez encore le temps de jouer à des jeux vidéo ?
C’est une bonne question ! A dire vrai, je joue beaucoup moins qu’avant. Et quand je le fais, j’ai aujourd’hui un regard différent : j’essaie de décrypter les mécanismes du jeu.
Propos recueillis par Marie-Pierre Noguès-Ledru
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