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Non-respect du Smic : sans mauvaise foi caractérisée de l'employeur, pas de dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires
Dans un arrêt du 29 septembre 2021, la Cour de cassation juge qu'en cas de non-respect du Smic, le salarié peut obtenir des dommages-intérêts compensatoires s'il prouve non seulement le préjudice qu’il a subi en raison du non-respect du Smic mais également la mauvaise foi de son employeur.
Le non-respect du Smic est non seulement passible de l’amende prévue pour les contraventions de 5e classe applicable autant de fois qu’il y a de salariés concernés mais l’employeur peut également être condamné civilement à verser au salarié un rappel de salaire calculé de façon à porter la rémunération au niveau du Smic ainsi qu’à des dommages-intérêts.
Le salarié peut demander au conseil de prud’hommes deux sortes de dommages-intérêts :
- ceux compensant simplement le retard : ce sont les intérêts moratoires ;
- ceux compensant le préjudice subi du fait du non-paiement : ce sont les dommages-intérêts compensatoires.
En vertu de l’article L.1231-6 du code civil, des dommages-intérêts compensatoires sont accordés si le créancier prouve la mauvaise foi de son débiteur et le préjudice qu’il a subi.
Un salarié est-il soumis à cette règle pour obtenir le versement de dommages-intérêts en cas de manquement patronal à l’obligation de paiement d’une rémunération au moins égale au Smic ? C’est, entre autres, la question posée à la Cour de cassation dans un arrêt du 29 septembre 2021.
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Les faits
Dans cette affaire, un couple de co-gérants non salariés d’une succursale d’un commerce de détail alimentaire (supérette) depuis 2002 avait obtenu en justice le paiement d’un rappel de salaire au titre du Smic sur plusieurs années ainsi que, pour la co-gérante, des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour non-respect de ce minimum d’ordre public. La société qui leur avait confié la gestion de cette supérette conteste la condamnation en appel au versement de ces dommages-intérêts, estimant que la co-gérante n’avait pas caractérisé sa mauvaise foi ni l’existence d’un préjudice indépendant du retard de paiement.
La Cour de cassation lui donne raison. Pour les Hauts magistrats, si les juges du fond avaient estimé que le défaut du bénéfice du Smic avait bel et bien causé un préjudice distinct de celui compensé par les intérêts moratoires, ils n’avaient pas caractérisé la mauvaise foi de la société.
À noter qu’en vertu de l’article L.7322-1 du code du travail, les gérants de succursales de commerces de détail alimentaire bénéficient des dispositions du code du travail dont celles relatives au Smic, à la durée du travail, aux repos et aux congés payés et à la sécurité du travail. Même si, en l’espèce, il s’agit de non-salariés, la décision adoptée par la Cour de cassation faisant l’objet des commentaires suivants est applicable aux salariés.
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Application des règles de droit civil en matière de dommages-intérêts
En 2011, la cour de cassation avait pourtant jugé que le manquement patronal à l’obligation de paiement d’une rémunération au moins égale au Smic causait nécessairement un préjudice qui pouvait être réparé en justice (arrêt du 29 juin 2011).
En l’espèce, une salariée, employée de vestiaire dans une discothèque, avait obtenu le paiement de différentes indemnités de rupture, et des rappels de salaires. Toutefois, la cour d’appel avait refusé l’attribution de dommages-intérêts pour non-respect du Smic au motif qu’elle n’apportait pas la preuve de son préjudice. À tort. Par cette décision, la Cour de cassation semblait vouloir faciliter l’attribution d’une réparation supplémentaire au salarié puisqu’il suffisait d’établir que le salaire minimum n’avait pas été versé.
Aujourd’hui, pour la première fois s’agissant du Smic – à notre connaissance – la Chambre sociale revient à une application plus orthodoxe des règles de la responsabilité civile et commune à l’ensemble des chambres civiles, en faisant une stricte application de l’article L.1231-6 du code civil. Ainsi, des dommages-intérêts compensatoires peuvent être accordés si le salarié prouve non seulement le préjudice qu’il a subi en raison du non-respect du Smic mais également la mauvaise foi de son employeur.
Elle avait déjà opéré ce virage s’agissant de la remise tardive des bulletins de paie (arrêt du 13 avril 2016), du paiement des heures de trajet (arrêt du 25 mars 2020) ou bien encore des indemnités pour travail dominical et les jours fériés (arrêt du 19 octobre 2016).
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Géraldine Anstett
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