Période d’essai : une rupture après son expiration est un licenciement sans cause réelle et sérieuse

La période d’essai d’un contrat de travail ne peut être rompue après son expiration. La Chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé cette règle dans un arrêt rendu le 3 juillet (pourvoi n° 22-17.452).

Un salarié avait été engagé en tant que directeur commercial par une société le 6 janvier 2015, « avec une période d’essai de six mois », susceptible d’être renouvelé une fois », indique la plus haute juridiction judiciaire, s’appuyant sur un arrêt rendu le 13 avril 2022 par la cour d’appel de Paris, contre lequel l’employeur avait formé un pourvoi.

Le 24 juillet 2015, l’employeur avait « mis fin à la période d’essai », précise la juridiction suprême. La cour de Paris avait considéré que cette rupture « était intervenue postérieurement à l’expiration de la période d’essai et s’analysait donc en un licenciement ». Elle avait jugé « le licenciement non fondé sur une cause réelle et sérieuse », condamnant l’employeur « à payer au salarié des dommages-intérêts à ce titre et des sommes à titre d’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, de rappel de salaires outre congés payés et de contrepartie financière de la clause de non-concurrence ».

La cour d’appel n’était pas « tenue d’examiner les motifs énoncés par l’employeur »

L’employeur s’était pourvu en cassation. Selon son argumentation, « en considérant que la lettre de rupture était présentée par l’employeur comme une rupture de la période d’essai pour décider qu’elle ne pouvait s’analyser en une lettre de licenciement et refuser d’en examiner le contenu, la cour d’appel n’a[avait] pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a[vait] violé » certains articles du Code du travail, notamment l’article L. 1232-1.

La Cour de cassation, juge du droit, n’est pas convaincue. « La cour d’appel, qui a constaté que l’employeur avait rompu la période d’essai après l’expiration de celle-ci, a exactement retenu, sans être tenue d’examiner les motifs énoncés par l’employeur dans la lettre de rupture, que la rupture du contrat de travail s’analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse », estime la juridiction suprême de l’ordre judiciaire. Le pourvoi est donc rejeté. La société est condamnée aux dépens ainsi qu’à verser au salarié 3 000 euros au titre des frais exposés non compris dans les dépens.

Tout licenciement pour motif personnel est impérativement motivé

Si, comme le prévoit l’article L. 1232-1 du Code du travail, tout licenciement pour motif personnel est impérativement motivé et doit reposer sur une cause réelle et sérieuse, ce n’est pas le cas de la période d’essai, dont les règles sont distinctes (article L. 1231-1).

Facultativement inscrite dans le contrat à durée indéterminée (CDI) ou à durée déterminée (CDD), la période d’essai permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent (article L.1221-20). La période d’essai et la possibilité de la renouveler ne se présument pas. Elles sont expressément stipulées dans la lettre d’engagement ou le contrat de travail (article L.1221-23).

Dans le cas d’espèce, si la période d’essai avait été renouvelée, l’employeur aurait pu mettre fin sans motif au contrat de travail. Il aurait ainsi évité de se mettre en tort au regard des règles du licenciement.

Timour Aggiouri