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PLF 2025 : l'essentiel des mesures fiscales

Le projet de loi de finances pour 2025 a été déposé le 10 octobre 2024 à l’Assemblée nationale. Sans surprise, pour endiguer un déficit public record, les mesures de sobriété fiscale proposées sont nombreuses : surtaxe d’impôt sur les sociétés, contribution sur les ménages les plus aisés, rabotage de l'avantage fiscal des LMNP, report de la suppression de la CVAE. Focus sur les principales mesures.

PLF 2025 : l'essentiel des mesures fiscales
Selon Antoine Armand, ministre du Budget et des Comptes publics, "la proposition du gouvernement c’est [...] un effort de redressement partagé [...] qui exclut tout matraquage fiscal et toute cure d’austérité". © Getty Images

Le déficit public pourrait atteindre 7 % du PIB en 2025, en l’absence de mesures d’ampleur, c’est ce qu’ont affirmé Antoine Armand, ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie et Laurent Saint-Martin, ministre du Budget et des Comptes publics lors de la présentation du Budget 2025 à Bercy, jeudi 10 octobre 2024. Pour le ramener à 5 % en 2025 et sous 3 % d’ici 2029, le gouvernement s’engage dans un effort global de redressement des comptes publics de l’ordre 60 Md€ d’économies.

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Le projet de loi de finances pour 2025 (PLF 2025) repose sur deux axes : une réduction massive des dépenses publiques, à hauteur de 40 milliards d’euros, représentant les deux tiers de l’effort de solidarité envisagé (baisse des crédits, modération des dépenses des collectivités locales, freinage des dépenses sociales, etc.). Le tiers de l’effort restant, soit 20 milliards d’euros, proviendra notamment de contributions fiscales exceptionnelles, temporaires, et ciblées sur les grandes entreprises et les ménages les plus aisés. L’examen du texte par les députés débutera le 21 octobre prochain.

Fiscalité des particuliers

Indexation du barème de l’IR 2024 (art. 2)

Le barème de l’impôt sur le revenu dû au titre de 2024 serait revalorisé en fonction des prévisions de l’inflation attendue de 2024 par rapport à 2023, soit 2 %.

A noter : cette mesure, dont le coût est évalué à 3,7 Md€, permettrait d’éviter à près de 530 000 foyers d’entrer dans le champ de l’impôt sur le revenu.

Création d’une contribution différentielle sur les plus hauts revenus (art. 3)

L’article 2 du PLF 2025 prévoit d’instaurer une contribution temporaire permettant d’assurer une imposition minimale de 20 % sur les ménages les plus élevés. Ce mécanisme s’appliquerait, parmi les contribuables assujettis à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR), à ceux dont le revenu du foyer dépasse 250 000 € pour un célibataire et 500 000 € pour un couple.

Dès lors que le taux moyen d’imposition au titre de l’impôt sur le revenu et de la CEHR sera inférieur à 20 % du revenu fiscal de référence (RFR), une contribution différentielle sera appliquée pour atteindre ce niveau d’imposition. La contribution sera majorée pour les contribuables dont le revenu excède 330 000 € (célibataire) ou 660 000 € (couple). Un mécanisme de décote sera appliqué pour atténuer les effets de seuil.

Cette contribution s’appliquerait pendant 3 ans, dès l’imposition des revenus 2024 et jusqu’à l’imposition des revenus 2026.

A noter : environ 65 000 foyers fiscaux, représentant 0,3% des contribuables, seraient soumis à cette contribution exceptionnelle, dont le rendement est estimé à 2 Md€.

Suppression de la niche fiscale des loueurs en meublé non professionnels (LMNP) (art. 24)

Les contribuables relevant du régime de la LMNP peuvent, sous certaines conditions, déduire de leurs recettes locatives imposables les amortissements afférents au logement loué. A ce jour, ces amortissements ne sont pris en compte dans le calcul de la plus‑value lors de la cession dudit logement (CGI, art. 39 C). Cet avantage fiscal spécifique, susceptible d’entretenir un déport des loueurs nus vers la location meublée incite à la location meublée de courte durée et à vocation touristique (type AirBnB) au détriment de l’offre de logements affectés à la résidence principale.

Afin d’assurer une plus grande égalité de traitement entre les loueurs professionnels et non professionnels, l’article 24 du PLF 2025 prévoit que les amortissements admis en déduction du résultat imposable pendant la période de location d’un bien soient réintégrés dans l’assiette de la plus‑value en cas de revente. A défaut de précision dans l’article, cette disposition s’appliquerait à l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2024 et des années suivantes, soit aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2024. Toutefois selon l’exposé des motifs, cette mesure s’appliquerait aux cessions réalisées à compter du 1er janvier 2025.

Autres mesures intéressant les particuliers :

  • La définition de domicile fiscal en France serait précisée compte tenu de la jurisprudence du Conseil d’Etat (CE, 5 févr. 2024, n° 469771). Ne pourraient désormais pas être considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens des dispositions du CGI, les personnes qui, par application des conventions internationales, ne sont pas résidentes fiscales de France (CGI, art. 4 B) (PLF 2025, art. 23).
  • Le régime fiscal des bons de souscription des parts de créateurs d’entreprises (BSPCE) (CGI, art. 163 bis G) serait modifié avec l’introduction d’une distinction entre gain d’exercice et gain de cession de titres souscrits en exercice des BSPCE. La doctrine qui prévoit l’inéligibilité des titres et BSPCE aux plans d’épargne salariale et PEA serait légalisée (PLF 2025, art. 25).

Fiscalité des entreprises

Contribution exceptionnelle sur les grandes entreprises (art. 11 et 12)

L’article 11 du PLF 2025 prévoit la création d’une contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises au titre des deux exercices consécutifs clos à compter du 31 décembre 2024. Seraient visées, les entreprises redevables de l’impôt sur les sociétés (IS), ayant réalisé un chiffre d’affaires supérieur ou égal à 1 Md € en France. La contribution serait assise sur l’IS, déterminé avant réductions et crédits d’impôt.

Deux niveaux d’imposition seraient prévus, en fonction du chiffre d’affaires :

  • pour un chiffre d’affaires entre 1 et 3 Md€, le taux de la contribution exceptionnelle serait de 20,6 % pour le premier exercice clos à compter du 31 décembre 2024 et 10,3 % pour le second exercice clos à compter de cette date ;
  • pour un chiffre d’affaires supérieur à 3 Md€, ces taux sont respectivement portés à 41,2 % et à 20,6 %.

Un mécanisme de lissage serait prévu en cas de dépassement des seuils d’assujettissement de moins de 100 M€.

Cette contribution exceptionnelle ne serait pas déductible du résultat imposable. Par ailleurs, aucune réduction, crédit d’impôt ou créance fiscale ne serait imputable sur la contribution exceptionnelle.

La contribution devrait être payée au plus tard à la date prévue pour le versement du solde de liquidation de l’IS (soit les 15 mai 2025 et 2026 pour une entreprise clôturant aux 31 décembre 2024 et 2025).

A noter : 400 entreprises devraient être concernées. Cette mesure exceptionnelle et ciblée devrait rapporter 8 Md€ en 2025 et 4 Md€ en 2026.

Pour tenir compte des modalités spécifiques d’imposition des entreprises de transport maritime, la contribution exceptionnelle sur ces entreprises serait assise sur la part du résultat d’exploitation correspondant aux opérations de fret maritime, à un taux de 9 % pour le premier exercice clos à compter du 31 décembre 2024 et 5,5 % pour le second premier exercice clos à compter du 31 décembre 2024 (PLF 2025, art. 12).

Report de 3 ans de la suppression progressive de la CVAE (art. 15)

Initialement engagée en 2023, puis échelonnée sur quatre années jusqu’en 2027 (L. fin. 2024, n° 2023-1322, 29 déc. 2023, art. 79 et 157 : JO, 30 déc.), la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) serait une nouvelle fois reportée.

L’article 15 du PLF 2025 prévoit de reporter de trois années la poursuite de la trajectoire de suppression définitive de la CVAE, d’ici à 2030. Ainsi, la trajectoire initiale de baisse des taux prévue de 2025 à 2027 serait décalée de 3 ans, soit de 2028 à 2030, et le taux de 2024 reconduit pour les années 2025 à 2027.

Les taux d’imposition à la CVAE seraient ainsi maintenus pour les années 2025 à 2027 à leur niveau de 2024, soit, pour le taux maximal, 0,28 %. Ce taux serait ensuite abaissé à 0,19 % en 2028, 0,09 % en 2029, et la CVAE serait totalement supprimée en 2030. Enfin, le taux du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée serait maintenu à 1,531 % pour les impositions dues de 2025 à 2027. Puis, il serait abaissé à 1,438 % pour celles dues en 2028, 1,344 % pour celles dues en 2029 et enfin 1,25 % à compter de 2030 et des années suivantes.

Taxe sur les rachats-annulations de titres (art. 26)

L’article 26 du projet de loi de finances pour 2025 propose d’instituer une taxe de 8 % sur les réductions de capital  résultant de l’annulation des actions rachetées par les grandes entreprises.

Seraient concernées les grandes entreprises, à savoir celles réalisant un chiffre d’affaires individuel ou consolidé de plus d’1 Md€. Pour les groupes, le chiffre d’affaires s’entendrait de celui figurant dans les états financiers consolidés ou combinés. La taxe ne serait pas applicable aux réductions de capital réalisées aux fins de compenser une augmentation de capital et de faciliter une fusion ou une scission par rachat ou annulation d’actions représentant au plus 0,25 % du montant du capital social.

La taxe serait assise sur la somme constituée par le montant de la réduction de capital et une fraction des sommes qui revêtent sur le plan comptable le caractère de primes liées au capital.  Elle serait calculée au taux de 8 % et déclarée et liquidée sur l’annexe à la déclaration de TVA déposée au titre de la période au cours de laquelle est intervenue la demande d’inscription modificative au RCS. La taxe ne serait pas déductible des résultats imposables.

Cette taxe serait applicable aux opérations de réductions de capital réalisées à compter du 10 octobre 2024, date de présentation du projet de loi de finances en conseil des ministres.

Accompagnement du secteur agricole en sortie de crise (art. 18 et 19)

Le PLF 2025 prévoit plusieurs mesures fiscales pérennes visant à soutenir le monde agricole. Parmi ces mesures :

  • le renforcement du dispositif de déduction pour épargne de précaution en permettant une exonération partielle de 30 % en cas de mobilisation de l’épargne pour faire face à un aléa climatique, sanitaire ou environnemental (art. 18) ;
  • le relèvement de 20 à 30 % de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) en faveur des terres agricoles (art. 18) ;
  • l’évolution des paramètres de la déduction en faveur des stocks de vaches laitières et allaitantes afin d’inciter à l’accroissement du cheptel bovin français (art. 18) ;
  • une série de mesures d’incitations fiscales en faveur la transmission des exploitations agricoles au profit de jeunes agricultures s’installant pour la première fois (art. 19).

Autres mesures intéressant les entreprises :

  • Aménagement du dispositif d’imposition minimale mondiale de 15 % des groupes d’entreprises (« Pilier 2 » ; CGI, art. 223 VJ à 223 WZ), afin d’intégrer les précisions et clarifications apportées par l’OCDE qui n’ont pas pu être intégrées lors de la transposition de la directive (UE) 2022/2523 par l’article 33 de loi de finances pour 2024 (PLF 2025, art. 13).
  • Aménagement du régime fiscal de faveur applicable aux opérations de restructurations d’entreprises à la suite de l’ordonnance n° 2023-393 du 24 mai 2023 qui a réformé le régime en droit des sociétés. Cette ordonnance a introduit en droit interne les fusions ou scissions sans échanges de titres et les scissions partielles. Elle a également modifié la définition des apports partiels d’actifs (PLF 2025, art. 17).
  • Prorogation jusqu’au 31 décembre 2031 du dispositif de l’abattement fixe de 500 000 € pour les plus-values sur cession de droits sociaux des dirigeants partant à la retraite qui arrive à expiration le 31 décembre 2024 (CGI, art. 150-0 D ter) (PLF 2025, art. 19).
  • Intégration des 2 168 communes perdant le bénéfice du régime des ZRR au 1er juillet 2024, à compter de cette date et jusqu’au 31 décembre 2027, au dispositif des zones FRR ; modification des modalités de classement en FRR + à compter du 1er janvier 2025 (CGI art. 44 quindecies A) et prorogation jusqu’au 31 décembre 2027 du dispositif des exonérations dans les bassins d’emploi à redynamiser (BER) (CGI art. 1466, I quinquies A) (PLF 2025, art. 27).

Fiscalité environnementale

Adaptation des tarifs d’accise sur l’électricité (art. 7)

Les tarifs de l’accise sur l’électricité ont été diminués à leurs niveaux minimum autorisés par le droit européen de 2022 à 2024 afin de réduire les factures d’électricité des ménages et des entreprises pendant la crise énergétique liée à la guerre en Ukraine. La sortie progressive de ce bouclier tarifaire sur l’électricité au 1er février 2025 a été actée par la loi de finances pour 2024, afin de ramener l’accise sur l’électricité à son niveau d’avant crise.

L’article 7 du PLF 2025 propose d’adapter les tarifs normaux d’accise en sortie de bouclier tarifaire à compter du 1er février 2025, tout en garantissant une baisse d’au moins 9 % du tarif réglementé de vente d’électricité.

Les montants des tarifs normaux d’accise sur l’électricité seraient ajustés dès 2025 pour chaque catégorie fiscale. Le tarif pour les ménages serait de 25,09 €/MWh en 2025, tandis que celui des petites et moyennes entreprises et hautes puissances, désormais identiques, serait de 20,90 €/MWh. Ces tarifs seraient fixés par un arrêté ministériel, avec un montant modulable entre 5 et 25 €/MWh pour limiter les hausses des tarifs réglementés de vente d’électricité durant la période de transition.

Ces nouvelles dispositions entreraient en vigueur progressivement entre le 1er janvier 2025 et le 1er janvier 2030, afin d’assurer une transition progressive vers ces nouveaux tarifs.

Taux réduits de TVA sur les opérations liées au chauffage (art. 10)

L’article 10 du PLF 2025 propose de modifier, à compter du 1er janvier 2025, le champ des taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur la chaleur et le froid avec le droit de l’Union européenne, notamment la directive (UE) 2024/1275 du Parlement européen et du Conseil du 24 avril 2024 sur la performance énergétique des bâtiments.

Le champ des énergies renouvelables dont l’utilisation majoritaire dans un réseau de chaleur rend les livraisons de chaleur éligibles au taux réduit de 5,5 % serait défini par renvoi au code de l’énergie. Cette définition engloberait désormais explicitement l’énergie ambiante.

La fourniture et l’installation de chaudières recourant à des énergies fossiles dans les locaux d’habitation achevés depuis plus de 2 ans serait exclue des taux de TVA de 5,5 % ou de 10 % à compter des 1er janvier 2025. Ces opérations relèveraient alors du taux normal. Les travaux d’entretien ou de réparation des chaudières à combustibles fossiles existantes demeureraient soumis aux taux réduits.

Renforcement des malus CO2 et masse sur les véhicules de tourisme (art. 8)

Afin d’encourager la transition énergétique du parc automobile, les malus sur les émissions de CO2 applicables aux véhicules de tourisme seraient renforcés. Ils s’inscriraient désormais dans une perspective pluriannuelle (2025, 2026 et 2027) pour offrir de la visibilité aux acteurs économiques du secteur.

Le seuil du barème du « malus CO2 » serait abaissé de 5 g/CO2/km en 2025 puis de 7 g/CO2/km en 2026 et 2027, pour atteindre une taxation dès 99 g/CO2/km émis en 2027. Pour cibler les véhicules les plus émetteurs, son tarif maximum serait parallèlement augmenté de 10 000 € chaque année pour atteindre 90 000 € en 2027 pour les véhicules de 15 CV et plus et ceux avec des émissions supérieures à 185 g/km.

Le seuil de déclenchement du « malus masse » serait également abaissé, dès 2026, de 1 600 kg à 1 500 kg, avec un tarif marginal de 30 € à partir de 2 000 kg.

En outre, dès 2025, le bénéfice de l’abattement dont profitent aujourd’hui tous les véhicules hybrides non-rechargeables serait limité aux seuls véhicules performants sur le plan environnemental.

Parallèlement, les abattements pour les personnes morales acquérant des véhicules d’au moins 8 places prévus pour le malus CO2 et pour le malus masse seraient augmentés dès 2026 afin de ne pas pénaliser les véhicules servant au transport collectif.

Adaptation de la réfaction pour ancienneté sur les malus automobiles (art. 9)

Afin de mieux prendre en compte la perte de valeur des véhicules de tourisme d’occasion, un nouveau système de décote serait créé, basé sur l’ancienneté et l’usage du véhicule.

A ce jour, pour les véhicules d’occasion ayant fait l’objet d’une précédente immatriculation, le montant des malus CO2 et au poids est réduit de 10 % par année d’ancienneté après le 7e mois (BOI-AIS-MOB-10-20-40, 80 et 320).

L’article 9 du PLF 2025 propose de remplacer ce dispositif, à compter du 1er janvier 2025, par une décote désormais progressive, atteignant jusqu’à 100 % pour les véhicules âgés de plus de 15 ans. Par ailleurs, à compter du 1er janvier 2027, une réfaction additionnelle, comprise entre 1 % et 3,5 %, serait applicable, si le kilométrage annuel moyen du véhicule excède 20 000 kilomètres. La réforme s’appliquerait uniquement aux véhicules d’occasion nouvellement immatriculés à compter du 1er janvier 2025, sous réserve qu’ils n’aient pas fait l’objet d’une première immatriculation avant le 1er janvier 2015.

En outre, l’article 9 du PLF 2025 prévoit, à compter du 1er janvier 2026, que tous les véhicules d’occasion pour lesquels le malus CO2 ou le malus masse n’a pas été prélevé lors de la première immatriculation seront soumis au malus s’ils font ultérieurement l’objet d’une immatriculation alors que les conditions de non-taxation ne sont plus remplies.

Sandy Allebe

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