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Attention au licenciement pour un comportement toléré depuis longtemps!
Les juges estiment injustifié le licenciement pour faute grave d'un salarié pour son comportement agressif et son ton "vif" alors que, jusqu'à présent, il n'avait jamais été sanctionné pour ces faits et que, par ailleurs, les autres griefs qui lui étaient reprochés n'étaient pas établis.
Attention, tolérer des comportements répréhensibles pendant un certain temps peut se retourner contre l’employeur. C’est ce qu’a appris à ses dépens une entreprise qui a licencié son directeur commercial pour faute grave en invoquant certains faits qu’elle avait admis pendant des années. Pour les juges, cela suffit à écarter la cause réelle et sérieuse de licenciement.
Des faits sanctionnés longtemps tolérés
Le 12 avril 2012, le directeur commercial de cette entreprise reçoit sa lettre de licenciement qui contient un certain nombre de griefs. Il lui est reproché :
– de n’avoir pas informé l’entreprise de la mise à disposition d’un salarié intérimaire mettant l’employeur dans l’impossibilité de procéder aux formalités requises ;
– d’avoir harcelé et être à l’origine du burn-out du directeur industriel et logistique du groupe ;
– d’avoir eu une attitude délétère à l’encontre de ses collègues et de sa direction et d’avoir parfois employé un ton vif ;
– de n’avoir pas suffisamment établi des reportings mensuels.
La cour d’appel estime non fondés certains griefs notamment le harcèlement de son collègue, la gestion du salarié intérimaire et l’insuffisance de reportings.
En revanche, l’appréciation par les juges des griefs relatifs au comportement du salarié est à souligner. En effet, la cour d’appel reproche à l’employeur d’avoir sanctionné des faits qu’il a jusqu’alors acceptés. « Cette vivacité de ton adoptée par le salarié, dans ses mails, que l’employeur n’a pas précédemment considéré suffisante pour justifier le licenciement de son salarié ne peut davantage justifier le licenciement de ce salarié au motif d’une faute grave », estiment les juges. Et de poursuivre : « L’employeur qui a accepté pendant plusieurs années les critiques qu’a pu formuler [le salarié] en sa qualité de cadre dirigeant, énoncées sur un ton vif, ce qui n’est pas contesté, ne peut licencier ce salarié au motif d’une faute grave (…) alors que, précédemment, cette même attitude n’a pas même justifié l’adresse à son salarié d’une quelconque sanction ».
Elle juge ainsi le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.
La Cour de cassation écarte la faute grave
Devant la Cour de cassation, les arguments de l’employeur ne changent rien. L’entreprise mettait ainsi en avant son obligation de mettre un terme à des comportements susceptibles de constituer des faits de harcèlement moral, comme pouvait l’être un ton vif, susceptible de caractériser des méthodes de gestion du de management virulentes.
La Cour de cassation approuve la décision des juges du fond d’avoir jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse. « La cour d’appel, qui a examiné l’ensemble des griefs visés dans la lettre de licenciement et a constaté, soit qu’ils n’étaient pas établis, soit qu’ils avaient été tolérés pendant plusieurs années par l’employeur sans être sanctionnés a pu, sans faire d’autres recherches que ses constatations rendaient inopérantes, dire qu’ils ne caractérisaient pas une faute grave de nature à rendre impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ».
► La solution ainsi retenue par les juges, qui sanctionne la soudaine décision de l’employeur de licencier un salarié pour un comportement admis depuis de nombreuses années ne préjuge pas toutefois de la solution qui serait adoptée si un salarié, s’estimant victime de harcèlement moral suite à en raison de ce management autoritaire, saisissait à son tour les juges et reprochait à son employeur d’avoir laissé une telle situation perdurer aussi longtemps.
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