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CPF : les salariés devront mettre la main au portefeuille

Le gouvernement a eu une nouvelle fois recours au 49.3 pour faire adopter le projet de loi de finances pour 2023, le 11 décembre, à l'Assemblée nationale. Il a instauré en dernière minute un reste à charge pour les salariés qui souhaitent mobiliser leur compte personnel de formation en vue de suivre une formation. Le montant de cette participation sera précisé par décret.

CPF : les salariés devront mettre la main au portefeuille
69 % des Français sondés se disent opposés à la systématisation d’un reste à charge pour le bénéficiaire, dans le cadre de la mobilisation de son CPF, selon un sondage Ipsos publié le 8 décembre 2022 par Wall Street English. © Getty Images

Après l’échec de la commission mixte paritaire, réunie le 6 décembre, sur le projet de loi de finances pour 2023 (PLF), la Première ministre, Élisabeth Borne, a une nouvelle fois eu recours à l’article 49.3 et a engagé, le 11 décembre, la responsabilité du gouvernement sur la deuxième partie du budget et l’intégralité du texte. Avant la deuxième lecture du texte à l’Assemblée nationale ce week-end, le gouvernement avait confirmé, via un amendement déposé samedi en fin de journée, son intention – déjà précisée en première lecture- d’instaurer un reste à charge pour les salariés qui souhaitent mobiliser leur compte personnel de formation.

Une participation proportionnelle ou forfaitaire

Le texte complète ainsi l’article 49 du projet de loi et indique que la participation du titulaire « peut être proportionnelle au coût de la formation dans la limite d’un plafond ou fixée à une somme forfaitaire ». Elle serait demandée à tous les salariés en vue de financer une action de formation, une validation des acquis de l’expérience (VAE) ou un bilan de compétences. Ce reste à charge ne concerne pas les demandeurs d’emploi « qui ont le plus besoin d’une formation ». Ni même les salariés qui parviennent à co-construire un projet de formation avec leur entreprise soit par accord d’entreprise ou individuellement. Dans ce cas, ces derniers recevront un abondement de leur entreprise.

L’exposé des motifs précise que les modalités de mise en œuvre seront précisées par décret en Conseil d’Etat, que ce soient pour le « taux de participation », les « conditions de sa possible prise en charge par un tiers » ou encore le « niveau minimal d’abondement par l’employeur ».

Une série de mesures pour limiter les dérives du CPF

Selon l’exécutif, le compte personnel de formation a généré cinq millions d’inscriptions. Revers de la médaille, cette réforme a aussi un coût : 6,7 milliards d’euros engagés par la Caisse des dépôts et consignations, organisme gestionnaire du CPF. Aussi le gouvernement entend-il réguler l’utilisation du dispositif en enjoignant les Français à mettre la main au portefeuille tout en s’assurant que « les formations s’inscrivent dans un projet professionnel solide ».

D’ores et déjà, l’exécutif a mis en place une série de mesures pour limiter les dérives du dispositif. Le 7 décembre, le Sénat a voté à l’unanimité et sans modification la proposition de loi sur la fraude au CPF. Le texte devrait être promulgué rapidement, sauf saisine surprise du Conseil constitutionnel. Par ailleurs, le renouvellement du Répertoire spécifique, en janvier dernier, avait conduit « à éliminer deux tiers des certifications dont l’intérêt n’était plus avéré pour l’évolution professionnelle des actifs », selon Carole Grandjean, la ministre de l’enseignement et de la formation professionnels, auditionnée le 7 décembre, au Sénat.

En outre, l’intégralité de l’offre portant sur la création et la reprise d’entreprise a été revue ; « près de 60 % des offres ont ainsi été déréférencées car elles sont apparues non conformes ». Enfin, le gouvernement a lancé, le 25 octobre, le service France Connect +, pour sécuriser le CPF. Lequel permet, grâce au service d’identité numérique de La Poste, de lutter contre l’usurpation d’identité lors de la réalisation de démarches administratives sensibles.

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Sept Français sur 10 opposés à un reste à charge

Reste que l’amendement passe mal auprès des syndicats. Michel Beaugas, secrétaire confédéral FO, en charge de l’emploi et de la formation professionnelle, a aussitôt réagi, dimanche, sur Twitter en indiquant que « le CPF est un droit ». « Instaurer un reste à charge est une atteinte à ce droit » a alerté le syndicaliste. L’Unsa a indiqué par communiqué que cette décision remettait « en cause le principe de la liberté de choisir son avenir professionnel énoncé dans la loi de septembre 2018 ».

De son côté Éric Coquerel, président de la commission des Finances à l’Assemblée nationale (LFI), a estimé, sur BFM, que ce procédé était « scandaleux ». « On nous dit que la formation est nécessaire tout au long de la vie pour changer de métier, se reconvertir et là on va demander aux salariés de payer », a-t-il déclaré.

Autre point faible : 69 % des Français sondés se disent opposés à la systématisation d’un reste à charge pour le bénéficiaire, dans le cadre de la mobilisation de son CPF, selon un sondage Ipsos publié le 8 décembre 2022 par Wall Street English. Cette opposition est encore plus forte pour les personnes ayant un niveau de diplôme inférieur au bac (74 %).

Seule concession : 83 % des sondés souscrivent à l’idée de responsabiliser davantage les apprenants en instaurant un reste à charge pour les seuls actifs qui n’iraient pas au bout de leur parcours de formation.

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Anne Bariet

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