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Déménagement d'entreprise : le casse-tête en cas de refus des salariés
Dans certaines situations, les salariés peuvent refuser de suivre leur entreprise qui déménage. Mais les conséquences du refus du salarié ne sont pas appréhendées par le code du travail et constituent un sérieux casse-tête pour les DRH. Le licenciement qui peut s'en suivre n'est pas sécurisé, alertent les avocats.
C’est une problématique à laquelle sont souvent confrontées les entreprises mais que le code du travail ignore (1) : le déménagement de l’entreprise et, plus précisément, le sort des salariés qui refusent d’intégrer leur nouvelle entreprise après un déménagement des locaux. Les avocats d’entreprises qui comptaient sur le projet de loi Travail – qui redéfinit le motif économique de licenciement – pour éclaircir la situation sont déçus. « La nouvelle définition laisse toujours de côté la réorganisation faite dans l’intérêt de l’entreprise, comme le déménagement d’entreprise », constate Danièle Chanal, avocate associée au sein du cabinet Joseph Aguera & Associés et vice-présidente d’Avosial (2) alors que cela peut contribuer à être visible ou à développer son chiffre d’affaires ».
Le déménagement d’entreprise recouvre en fait plusieurs situations bien distinctes.
1) L’entreprise déménage dans le même secteur géographique
Pour se prononcer sur la nature du changement d’affectation – un simple changement dans les conditions de travail ou une modification du contrat de travail – les juges vérifient si la nouvelle affectation du salarié est située ou non dans le même « secteur géographique » que la précédente.
Dans l’hypothèse où il n’y pas de changement de secteur géographique, le salarié qui refuse de déménager peut être licencié pour motif personnel puisque son contrat de travail n’est pas modifié. Il n’est donc pas en droit de refuser ce changement dans les conditions de travail.
2) L’entreprise déménage hors de son secteur géographique
En revanche, lorsque l’entreprise change de secteur géographique, la situation est tout autre. Il faut là encore distinguer deux hypothèses :
– soit le contrat de travail du salarié contient une clause de mobilité, il n’y a pas de modification du contrat de travail (sauf à ce que la clause soit excessive par exemple et contestée par le salarié) ;
– soit le contrat de travail ne prévoit rien, il s’agit alors d’une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser. Et c’est là où ça se corse ! Car le refus du salarié n’est pas le motif du licenciement ; ce sont les raisons qui justifient le déménagement qui légitimeront (ou non) la rupture du contrat de travail. Le motif par nature n’est pas personnel – il ne tient pas à la personne du salarié, il doit alors répondre à la définition du licenciement économique. « Si nous ne pouvons pas démontrer l’existence de difficultés économiques ou que notre compétitivité n’est pas menacée, on ne peut pas licencier. Le motif est manquant », déplore Danièle Chanal.
(1) Il y a seulement deux occurrences dans le code du travail sur le terme même de « déménagement » et elles visent non pas le déménagement d’entreprise mais le secteur d’activité ! Ainsi, le secteur du déménagement fait partie de ceux dans lesquels des contrats de mission ou des CDD peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI, en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois
(2) Propos tenus lors d’une conférence de presse d’Avosial le 29 avril dernier.
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