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Fusion des IRP : de droit pour les sociétés de moins de 300 salariés, par accord pour les autres
Pour sa réforme "ambitieuse" du dialogue social et des instances représentatives du personnel (IRP), qui sera présentée fin mars ou début avril en Conseil des ministres pour être votée cet été, le gouvernement prévoit un regroupement des IRP des entreprises en deçà de 300 salariés, et une simplification de l'information-consultation. Explications et réactions syndicales.
Le gouvernement ne reprend pas ligne à ligne le dernier projet d’accord connu des négociations sur le dialogue social, qui comportait l’idée chère au Medef d’une fusion de l’ensemble des institutions représentatives du personnel (CE, DP, CHSCT, DS), quelle que soit la taille de l’entreprise. Mais il s’en inspire fortement, d’où des réactions syndicales très contrastées.
Vers un regroupement des instances
Le gouvernement a opté pour un compromis : regroupement des instances dans les petites entreprises, maintien de l’existant au-delà. Dans les PME, la délégation unique du personnel (DUP), qui permet à une entreprise de regrouper délégués du personnel et comité d’entreprise, sera élargie au CHSCT, le plafond de la DUP passant de moins de 200 à moins de 300 salariés. Il ne s’agirait pas juridiquement d’une fusion des instances mais d’un regroupement (*).
« Un regroupement sans précédent. Mais qui se fera sans baisse des heures de délégation des élus », a promis hier soir, devant la presse, François Rebsamen. Le gouvernement assure aussi que les prérogatives actuelles du CHSCT, dont le droit d’agir en justice, seront maintenues au sein de l’instance unique. On ignore cependant les contours exacts de cette instance. Le ministre de travail va d’ailleurs poursuivre la concertation avec les partenaires sociaux pour l’élaboration du projet de loi, qui sera présenté en Conseil des ministres fin mars ou début avril, pour être voté dès cet été. Laurent Berger (CFDT) a prévenu qu’il serait vigilant sur ces questions des moyens dévolus aux élus.
Accord dérogatoire pour une instance unique au-delà de 300 salariés
Selon le projet actuel du gouvernement, les instances représentatives actuelles demeureront distinctes à partir de 300 salariés. Toutefois, comme la CFDT l’avait suggéré, les entreprises pourront prévoir, par accord dérogatoire, d’organiser autrement leurs institutions représentatives, par exemple sous la forme d’une instance unique. Un point inacceptable pour FO comme pour la CGT.
L’information-consultation concentrée en 3 grands rendez-vous
L’obligation d’information-consultation du CE devrait être réorganisée pour être simplifiée et concentrée. Le Premier ministre propose trois grandes consultations annuelles sur :
- la situation économique et financière de l’entreprise ;
- la situation sociale ;
- les orientations stratégiques et leurs conséquences pour les salariés.
« La loi précisera dans quels cas la double consultation [d’une instance locale et d’une instance nationale] est nécessaire, et dans quels cas elle ne s’impose pas », a précisé Manuel Valls hier en donnant cet exemple : « Si un projet peut avoir des conséquences sur l’emploi dans un établissement, il est légitime que le comité d’établissement soit aussi consulté, et pas seulement le comité central d’entreprise. En revanche, si le projet envisagé est global, s’il n’a pas de conséquences spécifiques sur l’emploi ni sur les contrats de travail des salariés d’un établissement, on peut vraiment s’interroger sur l’utilité de cette consultation ».
Le gouvernement envisage de regrouper les négociations obligatoires mais aussi de laisser la possibilité aux entreprises d’organiser elles-mêmes, par accord collectif, le nombre et le rythme de ces négociations. Il s’agit là encore d’un compromis, le patronat souhaitant passer à un rythme triennal pour les NAO, ce dont ne voulaient pas les syndicats. « Ce sont les acteurs au sein de l’entreprise qui vont, au quotidien, dialoguer : laissons-les décider de la meilleure configuration possible de ce dialogue pour eux, en prenant compte des spécificités de chaque entreprise, de sa taille, de son activité, etc. –tout en maintenant, bien entendu, un cadre commun. Ce sera un gage d’efficacité pour tout le monde », a justifié hier soir François Rebsamen.
Des commissions régionales pour les TPE
Sur la représentation des salariés des très petites entreprises (moins de 11 salariés), le gouvernement propose de créer « dans chacune des 13 grandes régions et Outre mer une commission régionale interprofessionnelle composée de 10 salariés et de 10 employeurs de TPE ». « Ces représentants seront très éloignés des salariés des entreprises », a déploré Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT.
Pour rassurer les organisations patronales très réticentes sur ces commissions, et notamment la CGPME, le Premier ministre a précisé qu’elles n’auront « évidemment aucun droit d’ingérence dans la marche de ces entreprises ». Leur rôle consistera à « donner des conseils aux salariés et aux employeurs en matière de droit du travail » et assurer « une concertation sur l’emploi et la formation ». Un rôle limité qui n’a pas empêché Laurent Berger, de la CFDT, de souligner que ces commissions représentaient « un grand point de satisfaction », tandis que Pierre Gattaz, pour le Medef, prévenait qu’il ne voulait pas de « comités d’intrusion dans les TPE ».
Rémunération des élus et parité homme femme
Sur les parcours syndicaux, le gouvernement est pour l’instant peu prolixe. Il reprend l’idée du projet d’accord avorté d’une garantie de rémunération non discriminatoire pour les élus du personnel et d’un entretien de fin de mandat. Lors de son point presse, le Premier ministre a également évoqué la formation et la reconnaissance des acquis de l’expérience, mais sans précisions. Il a surtout annoncé vouloir inscrire dans la loi l’objectif d’une représentation équilibrée des femmes et des hommes parmi les représentants des salariés.
Deux conférences sociales
Au-delà de la question des IRP, Manuel Valls a aussi posé hier soir plusieurs jalons pour de prochaines réformes. Deux conférences sociales thématiques réuniront les partenaires sociaux d’ici l’été :
– en avril, une conférence dressera le bilan de la loi sur la sécurisation de l’emploi. Des mesures législatives pourraient en découler. On pense notamment à une modification des accords de maintien dans l’emploi, auxquels les entreprises, comme PSA ou Faurecia récemment, préfèrent des accords compétitivité. Il faudra suivre de près la question de l’effet d’un accord collectif sur le contrat de travail d’un salarié ;
– en juin, une conférence traitera de la création d’emplois dans les petites entreprises.
La piste d’expérimentations d’accords dérogatoires
Le Premier ministre lance deux autres pistes de réforme. France Stratégie, l’organisme de réflexion rattaché au gouvernement, réalisera d’ici l’été une mission de réflexion sur le dialogue social « au niveau de la branche et de l’entreprise » afin « d’enrichir les possibilités d’expérimenter, d’être plus souples, de créer des droits mieux adaptés aux réalités spécifiques de chaque entreprise dans le respect bien sûr de l’ordre social ». L’idée est visiblement d’élargir le champ des accords d’entreprise par la voie de l’expérimentation, une demande patronale forte.
Second chantier : un groupe de travail planchera, également d’ici l’été, sur la sécurisation des parcours professionnels. L’idée est d’explorer de nouveaux comptes sociaux individualisés, à l’image du récent compte personnel de formation, le CPF. Une sorte de contrepartie aux futures mesures de flexibilité visiblement envisagées par le gouvernement.
Représentants des salariés dans les conseils d’administration
Le futur projet de loi sur le dialogue social incluera par ailleurs la reconnaissance du caractère spécifique du régime des intermittents, une mesure dénoncée hier par le Medef, ainsi que la nouvelle prime d’activité. Comportera-t-il également des dispositions sur la représentation des salariés dans les conseils d’administration, demandées notamment par la CFE-CGC mais pour l’instant non prévues ? Tout dépendra de la concertation qui doit se poursuivre jusqu’à l’élaboration du projet de loi, d’ici fin mars début avril.
(*) Au sein de l’actuelle DUP, en effet, les délégués du personnel et le comité d’entreprise conservent l’ensemble de leurs attributions (article L.2326-3)
DUP, CE, CHSCT, DP, DS : des instances encore peu implantées malgré 767 000 mandats existants |
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Au total, 6% des salariés, soit 600 000 personnes, déclaraient en 2011 détenir au moins un mandat de représentant du personnel, la moitié étant syndiqués (lire ici). Sur un total de 767 000 mandats titulaires, 250 000 concernent le mandat de DP, 170 000 le CE, 158 000 le CHSCT, 116 000 le DS, 65 000 la DUP, 8 000 le RSS (représentant de la section syndicale). C’est dire si toute recomposition de ce paysage constitue aussi un bouleversement pour le monde syndical sur le terrain, et pose la question de la proximité des salariés avec leurs représentants.
DUP. Selon les derniers chiffres du ministère du tTravail qui remontent à 2011, 28% des entreprises ayant la possibilité de s’organiser en DUP optent pour cette solution. Mais dans les entreprises qui organisent des élections, ce chiffre est devenu majoritaire dès 2002, indique la Dares. CE. La proportion d’établissements d’au moins 50 salariés qui déclarent la présence d’un comité d’entreprise est de 50% en 2011 contre 58% en 2005, soit une chute de 8 points en 6 ans. Le pourcentage monte cependant à 75% en 2011 (contre 81% en 2005) si l’on inclut la présence d’une DUP. CHSCT. Environ 7 établissements sur 10 d’au moins 50 salariés déclarent la présence d’un CHSCT. DS. Environ 60% des établissements de 50 salariés ou plus déclarent la présence d’au moins un délégué syndical dans l’établissement. |
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