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[Interview] Vincent Delahaye, sénateur : « Toutes les consommations électriques ne doivent pas se voir appliquer la même fiscalité »

A la suite de la commission d’enquête du Sénat sur la production, la consommation et le prix de l'électricité aux horizons 2035 et 2050, le sénateur Vincent Delahaye expose sa proposition de loi visant à baisser la fiscalité de l’électricité.

[Interview] Vincent Delahaye, sénateur : « Toutes les consommations électriques ne doivent pas se voir appliquer la même fiscalité »
« Toutes charges égales par ailleurs, sans changer la fiscalité, les tarifs de l’électricité vont mécaniquement baisser en 2025 de 20 à 25 %, les prix étant calculés par rapport à l’année de référence précédente. »

Cette proposition de loi vise à modifier deux types de fiscalités qui pèsent sur l’électricité, la TVA d’une part et l’accise sur l’électricité d’autre part.

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Quel est l’objectif de votre proposition ?

Nous souhaitons aller vers plus de régulation pour que les prix de l’électricité se rapprochent de leur coût de production plus que des fluctuations du marché. De façon générale, nous ne souhaitons pas seulement faire baisser le prix de l’énergie mais le rendre plus stable dans le temps pour éviter les effets de yo-yo très difficiles à gérer. À l’heure où l’on promeut des objectifs ambitieux et nécessaires de décarbonation de nos sociétés et alors que l’électricité n’est pas une marchandise comme une autre mais un bien de première nécessité, il n’est pas raisonnable de lui appliquer les niveaux de fiscalité pratiqués aujourd’hui. Il n’y a aucune raison de taxer autant une énergie décarbonée. Nous avons donc avancé plusieurs propositions. La baisse de la fiscalité et donc de la facture d’électricité que nous proposons permettrait d’améliorer le pouvoir d’achat des ménages et la compétitivité de nos TPE/PME.

Pouvez-vous expliciter votre proposition concernant la fiscalité appliquée à l’électricité pour les entreprises ?

Depuis les années 2000 et jusqu’à la crise énergétique mondiale de 2021-2023, les prix de l’électricité ont principalement augmenté en raison de la hausse de la fiscalité qui lui est appliquée. Au-delà de la réduction de la TVA de 20 % à 5,5 % qui ne concerne que les ménages sur la consommation électrique « de base » selon le mode de chauffage utilisé, nous proposons une réduction de l’accise sur l’électricité [ces impôts indirects sur la vente ou l’utilisation de certains produits tels que l’énergie, NDLR].

Partant du principe que toutes les consommations électriques ne doivent pas se voir appliquer la même fiscalité, nous proposons une fiscalité par paliers, en fonction du niveau de consommation et du type de chauffage utilisé. Dans le détail, l’accise passerait de 21 à 9,5 € par MWh pour les entreprises consommant jusqu’à 4,5 MWh qui ne sont pas au chauffage électrique et jusqu’à 6 MWh pour celles dotées d’un chauffage électrique. Sur les consommations intermédiaires, jusqu’à 7,5 MWh sans chauffage et 9 avec, l’accise resterait à son niveau actuel de 21 €. Cette même accise serait parallèlement augmentée à 32 € par MWh pour les volumes de consommation supérieur à 7,5 MWh ou 9 MWh par an suivant le type de chauffage, soit une consommation qui excède significativement le socle de consommation « de base ».

Une économie de 1 089 € sur la facture annuelle.

Sachant que le gouvernement avait prévu de revaloriser pour tout le monde début 2025 cette accise à 32 €, qui était le tarif de droit commun appliqué jusqu’en 2021 avant la crise des prix de l’énergie. Pour une entreprise, par exemple une boulangerie qui consomme en moyenne 99 MWh par an, la réduction du tarif de l’accise sur l’électricité représenterait une économie de 1 089 € sur la facture annuelle. Ainsi, ne bénéficieront vraiment de cette mesure que les TPE-PME qui ont une consommation d’électricité assez faible, sachant que « les électro-intensifs » bénéficient déjà de tarifs particuliers et que le facteur de baisse de prix de l’énergie le plus important pour les entreprises les plus énergivores se fera avec la mise en place du contrat pour différence signé entre EDF et l’État français. Toutes charges égales par ailleurs, sans changer la fiscalité, les tarifs de l’électricité vont mécaniquement baisser en 2025 de 20 à 25 %, les prix étant calculés par rapport à l’année de référence précédente.

À l’heure du déficit public record de la France, comment serait compensée cette nouvelle perte de recettes ?

Nous n’avons pas proposé une baisse générale de la fiscalité sur l’ensemble des consommations électriques, ce qui aurait été extrêmement coûteux pour les finances publiques. Notre proposition serait compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Charlotte de Saintignon

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