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JO 2024 : « L’avenir pour les TPE/PME est tout ce qui est annexe »
Si les TPE/PME s’approchent des 25 % de marchés conclus comme le prévoit la Charte encadrant le chantier des JO 2024, leur intérêt est davantage à chercher aux bords du projet, voire ailleurs, tant le gros œuvre reste l’apanage des majors du secteur.
« Dans tous les domaines, on fait appel à l’ensemble des entreprises dont les PME, a rappelé Antoine Du Souich, directeur de la stratégie et de l’innovation de la société de livraison des ouvrages olympiques (SOLIDEO) lors d’une table-ronde organisée le 8 juin par l’AJPME. Les grandes entreprises doivent ainsi confier 25 % de leur marché aux TPE/PME et structures de l’économie sociale et solidaire (ESS) sur plusieurs programmes ». Un objectif presque atteint sur le papier puisque 20,7 % des marchés sont aujourd’hui promis à 710 TPE/PME et 31 structures de l’ESS (sous-traitance inclus). Mais l’enveloppe associée est moindre qu’espéré : les marchés des petits poucets représentent seulement 164,4 M€ à ce jour, pour un objectif annoncé de 500 M€.
Signe que cet événement d’ampleur peine à s’ouvrir aux petites entreprises ? Si « ce n’est que le début et [que] la démarche est véritablement lancée », comme l’assure le patron de SOLIDEO, la théorie du ruissellement semble prendre le pas sur le « défi des TPE/PME » du Comité d’organisation Paris 2024. Surtout pour les TPE, et surtout dans la construction. Et si des opportunités restent à saisir, elles le sont surtout pour les PME innovantes et écologiques, et surtout dans les angles. « L’avenir pour les TPE/PME est tout ce qui est annexe : promotions, sports, mobiliers urbains, travaux paysagers, etc. », a ainsi renseigné le monsieur JO de la fédération du bâtiment, Jean-Luc Tuffier.
« Les jeux sont pipés »
Car le gros œuvre est réservé aux mastodontes du secteur. « Il faut différencier la partie construction pure et tout le reste. La construction, c’est les majors (Vinci, Bouygues, Eiffage par exemple, ndlr). On voulait 25 % pour tous les types de travaux. Mais on n’a obtenu que 25 % pour le global. On aura très peu de lots séparés », a regretté le président de la FFB Grand Paris. Et difficile de miser sur la sous-traitance pour sauver les meubles. Même si « rien n’empêche les PME/ETI de signer au fil de l’eau avec les majors », comme l’a rappelé Antoine Du Souich. L’horizon est bouché. « Pour les JO 2024, les majors amènent leurs sous-traitants de confiance. L’enjeu est grand, il ne faut pas se louper… », a démystifié Jean-Luc Tuffier.
Reste alors le second œuvre. « À partir du deuxième semestre 2022, toutes les TPE/PME du second œuvre seront mobilisées de façon massive. Il y aura beaucoup d’opportunités pour les artisans », a indiqué le directeur de SOLIDEO. Une fenêtre de tir là aussi sélective. « Je ne crois pas qu’un électricien avec deux salariés ait une chance, a ainsi lâché Jean-Luc Tuffier. Au niveau de la construction, les jeux sont pipés. On est moins dans un système ouvert comme espéré. » D’autant que la Charte sociale signée en juillet 2018 impose certaines contraintes. « Ce sont surtout les grosses PME qui sont visées, les entreprises solides qui ont l’habitude de travailler sur des protocoles très précis ».
Les TPE du BTP pourront quand même se consoler en prenant d’assaut les petits marchés délaissés de fait par des majors occupés. « L’avantage des JO 2024 est qu’ils libèrent de l’espace ailleurs, notamment les marchés un peu plus petits, a fait remarqué le président de la FFB. De 2012 à 2015, les majors – qui avaient assez de marge pour casser les prix – venaient sur les petits chantiers. On retrouve avec les JO 2024 un peu de liberté. »
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« Sujets ambitieux »
La porte d’entrée des JO 2024 s’ouvre donc aux PME d’une certaine taille. Surtout celles innovantes, qui présentent un fort impact social et environnemental. « Nous ne voulons pas faire les choses sans regard sur les impacts sociaux et environnementaux », a expliqué Antoine Du Souich. On compte ainsi parmi les PME lauréates, l’association Halage qui mène des chantiers d’insertion, la structure de l’ESS Tricycle qui fournit du mobilier recyclé ou encore l’entreprise Starklab qui dépollue l’air intérieur. « Nous sommes sur des sujets ambitieux qui attirent beaucoup de PME innovantes », a défendu le patron de SOLIDEO.
« C’est sûr qu’il faut connaître ses compétences », a illustré Benjamin Stetten-Pigasse, CEO de la PME Weematch – éco-conceptrice de textiles et objets publicitaires -, heureux élu d’un appel d’offres pour les JO dans la communication. « Le site ESS 2024 (ou le site entreprises 2024) répertorie des marchés de niches sur des sujets pointus mais qui conviennent aux TPE/PME. Même s’il faut renifler un peu », a-t-il souri.
Des marchés qui se méritent, une fois flairés. « Nous avions une équipe de 3 personnes exclusivement dédiée à l’appel d’offres, pour le suivre et le comprendre, réaliser des go/no go (des réunions où l’on décide ou non de la viabilité d’un projet, ndlr). Alors oui, cela nécessite d’être en veille active, de trouver du temps mais c’est une opportunité pour grandir, se développer et gagner en visibilité. » De 27 collaborateurs à l’époque de l’appel d’offres, Weematch en compte désormais 46. De quoi bientôt jouer dans la cour des grands.
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Matthieu Barry
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