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Le rebond se fait attendre pour les TPE-PME

Activité et emploi, trésorerie, accès au crédit, investissement… La 79e enquête de conjoncture semestrielle PME BPIfrance réalisée auprès de plus de 5 000 entreprises évalue la situation des TPE-PME à mi-2024.

Le rebond se fait attendre pour les TPE-PME
Le coût du crédit élevé et la faiblesse de la demande continuent de peser sur l’investissement, qui poursuivrait son ralentissement en 2024. © Getty Images

« Les chefs d’entreprise voient l’année 2024 moins bonne que l’année 2023 » affirme Philippe Mutricy, directeur de l’évaluation des études et de la prospective chez Bpifrance. Les TPE-PME anticipent un nouveau ralentissement de l’activité en 2024 dans un contexte de faiblesse de la demande. Le solde d’opinion sur l’évolution du chiffre d’affaires (soit la différence entre la proportion de répondants ayant exprimé une opinion positive et la proportion ayant exprimé une opinion négative) se situant à +2, recule de 6 points en six mois et de 10 points sur un an. Il s’éloigne de sa moyenne historique de long terme (+14).

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En termes de secteurs, la conjoncture est particulièrement difficile dans la construction, le commerce et les transports, atone dans l’industrie, alors que les services s’en sortent mieux. Si l’on segmente par taille d’entreprises, « ce sont les TPE qui tirent la croissance à la baisse : elles s’attendent à une baisse du chiffre d’affaires de 2,5 % alors que l’on est sur un taux de croissance positif pour les plus grosses PME » détaille Sabrina El Kasmi, responsable du pôle conjoncture au sein de Bpifrance. En revanche, l’enquête de Bpifrance met en avant la résilience des TPE-PME puisqu’en termes d’emploi, si « l’indicateur est en léger rempli sur un an, il s’est redressé et baisse deux fois moins que l’activité » poursuit-elle. Parmi les freins à la croissance, si les difficultés d’approvisionnement et de recrutement s’améliorent, « du côté de la demande, on ne peut pas dire qu’il y a une dégradation » mais les TPE-PME « jugent que leurs carnets de commande sont peu garnis » signale Sabrina El Kasmi.

Baisse de la rentabilité

Un quart des TPE-PME jugent encore leur trésorerie difficile, une proportion stable sur un an. La dégradation de la trésorerie depuis les points hauts atteints en 2021 post-crise sanitaire grâce aux différents dispositifs de soutien, s’interrompt. La situation de trésorerie se stabilise dans tous les secteurs, à l’exception des services, où la trésorerie s’est améliorée récemment (+5 points en 6 mois) et de la construction, où elle s’est à l’inverse dégradée (−6 points). Si les PME sont moins inquiètes qu’en novembre dernier quant à l’évolution future de leur trésorerie, elles ne s’attendent pas non plus à une amélioration. Les craintes de non-remboursement des PGE demeurent « limités et stables », à 4 % des TPE-PME ayant obtenu un PGE et les remboursements s’accélèrent avec 19 % qui déclarent avoir déjà intégralement remboursé leur PGE (+3 points en 6 mois) et 10 % qui prévoient de le rembourser dans son intégralité d’ici la fin de l’année 2024. En termes de rentabilité, celle-ci a diminué en 2023 et les dirigeants sont un peu plus nombreux à prévoir une diminution qu’une augmentation pour 2024. Là encore, le seul secteur où les TPE-PME se montrent les plus optimistes est celui des services (+3 points).

Et des investissements freinés par la faiblesse de la demande

Les conditions d’accès au crédit restent favorables. Après s’être durci depuis fin 2021, il s’est stabilisé début 2024. Le coût du crédit, qui était devenu fin 2023 le premier obstacle à l’investissement en raison de l’envolée des taux d’intérêt accordés aux PME (passant de 1,4 % en avril 2022 à 5,2 % en décembre 2023), reste un obstacle majeur. Mais, devant le coût du crédit (49 %), c’est la faiblesse de la demande (52 %) qui devient le principal frein à l’investissement. En conséquence, ce dernier poursuivrait son ralentissement cette année. Si 43 % des TPE-PME ont déjà investi ou comptent investir en 2024, (-2 points sur un an et -7 points sur deux ans), l’indicateur sur l’évolution des dépenses d’investissement perd 6 points sur un an (−9 points) et s’établit désormais sous sa moyenne de long terme (−4 points). C’est l’industrie qui tire son épingle du jeu avec 57 % des dirigeants qui prévoient des investissements.

Les dirigeants de très grosses PME sont plus confiants

Si « les perspectives du second semestre 2024 sont moins pessimistes que le semestre précédent », l’activité resterait peu dynamique en 2025. L’indicateur prévisionnel d’activité se stabilise à +16 mais reste nettement sous sa moyenne de long terme (+25 entre 2000 et 2023), avec des évolutions sectorielles assez hétérogènes : les perspectives se dégradent notamment dans le tourisme et les transports et restent moroses dans la construction et le commerce. A contrario, elles s’améliorent dans l’industrie et restent relativement porteuses dans les services. Philippe Mutricy met en exergue la concurrence internationale accrue à laquelle les TPE-PME doivent faire face. « Les entreprises ont réajusté leurs perspectives. Elles ne sont pas seulement soumises aux aléas politiques mais également à la concurrence internationale qui pourrait contraindre leur développement ». Tous les chefs d’entreprise ne semblent pas aussi confiants. Si les perspectives d’activité se stabilisent aussi bien chez les TPE de 1 à 9 salariés que chez les PME d’au moins 10 salariés prises dans leur ensemble, les dirigeants de très grosses PME (de 100 à 249 salariés) sont plus confiants car ce sont les seuls à voir leurs perspectives s’améliorer. En termes d’embauche, les perspectives résistent encore : l’emploi resterait plus dynamique que l’activité, avec un indicateur prévisionnel de +16, s’établissant proche de sa moyenne historique (+17).

Charlotte de Saintignon

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