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Pacte de la vie au travail : une voie étroite pour aboutir à un compromis

Si la plupart des organisations patronales et syndicales souhaitent parvenir à un accord interprofessionnel sur « le Pacte de la vie au travail », le 8 avril, elles restent encore sur leur faim. La réunion qui s’est tenue le 26 mars au Medef, n’a pas permis de lever tous les points d’achoppement.

Pacte de la vie au travail : une voie étroite pour aboutir à un compromis
Selon Jean-François Foucard (CFE-CGC), « les voies de passage sont très compliquées ». © Getty Images

Assurément, il faudra bien une nouvelle séance de négociation interprofessionnelle sur le « Pacte de la vie au travail » pour trouver un compromis. Car si l’avant-dernière réunion, qui s’est tenue le 26 mars au siège du Medef, a permis de faire bouger quelques lignes, il reste désormais à traduire concrètement ces avancées dans un avant-projet d’accord.

Et sur cette question les avis sont tranchés. L’optimisme est de mise pour la CPME qui indique, par la voie d’Eric Chevée, « être à une encablure de la conclusion d’un accord ». De même, Hubert Mongon (Medef) a déclaré être « confiant pour mener cette négociation à son terme et de façon positive ».

« Les lignes ont commencé timidement à bouger »

Mais pour la CFTC, le compte n’y est pas : « Ce qu’il y a dans la trame actuelle, ce ne sont que des réductions de droits pour les salariés », a estimé Eric Courpotin, le chef de file de la confédération chrétienne. Pour Sandrine Mourey (CGT), « ça coince sur des sujets qui sont quand même cruciaux. Il faut des aménagements de fins de carrière et des départs anticipés ».

Même écho de la part de Jean-François Foucard (CFE-CGC) : « Les voies de passage sont très compliquées, on ne signera pas un accord qui ne changera strictement rien pour les salariés ».

Entre ces positions, Yvan Ricordeau (CFDT) s’est montré plus nuancé : « Les lignes ont commencé timidement à bouger », en notant quelques avancées notamment sur la négociation obligatoire dédiée à l’emploi et aux conditions de travail des salariés seniors sans préciser toutefois les seuils et curseurs ; sur l’organisation des entretiens professionnels ou encore sur le renforcement d’un dialogue professionnel, un marqueur de la centrale de Belleville.

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Des points de blocage

Mais des points d’achoppement demeurent. Les syndicats s’opposent à la création d’un parcours d’évolution professionnelle (PEP) qui entraînerait une rupture du contrat de travail, dès lors qu’il est à l’initiative du salarié. « On va laisser sur le carreau des salariés qui n’auront pas les moyens de se reconvertir, a fustigé Eric Courpotin (CFTC). Nous sommes en train de louper le coche ».

La CPME souhaite, de son côté, que les Opco financent et effectuent les prestations de conseil des entreprises de 50 à 350 salariés afin de mener les entretiens professionnels, via une mutualisation des fonds de la formation. Selon la première version du texte, ces entretiens auraient lieu à des moments clés de la carrière (35, 45 ans, 55/60 ans) et se substitueraient aux entretiens professionnels actuels.

« Le principe d’un CDI de fin de carrière entrave la liberté individuelle du salarié » (CFE-CGC)

La CFE-CGC pointe du doigt le refus patronal d’un droit à la retraite progressive opposable et la suppression des pénalités en l’absence d’entretiens professionnels. Ces pénalités mises en place avec la loi Avenir professionnel pour les entretiens récapitulatifs qui ont lieu tous les six ans ont généré, selon Jean-François Foucard, « 54 000 abondements correctifs »*.

Par ailleurs, le chef de file de la confédération de l’encadrement estime que le « principe d’un CDI de fin de carrière entrave la liberté individuelle du salarié », dès lors que l’employeur pourrait y mettre un terme, une fois l’acquisition des trimestres requis pour partir à la retraite.

Autre déconvenue : le Medef a fermé la porte à l’idée d’un départ anticipé dès 60 ans (contre 62 ans à partir de 2030, en vertu de la dernière réforme des retraites), comme envisagé initialement.

Lire aussi Pacte de vie au travail : l’avant-projet d’accord du patronat suscite l’ire des organisations syndicales

Un nouveau texte le 3 avril

Le Medef s’est engagé à rédiger un nouveau projet d’accord pour le 3 avril afin de préparer la séance conclusive du 8 avril. Puis, les négociateurs signataires de la convention d’assurance chômage à l’automne devraient se revoir, le 10 avril, pour finaliser un avenant sur l’indemnisation des seniors qui ouvrira la voie à sa validation par le gouvernement.

Après ? L’U2P a réitéré son souhait d’inviter, mi-avril, les organisations patronales et syndicales à négocier sur le compte-épargne temps, en l’absence de disposition sur ce dispositif dans le texte final. « Pour nous ce qui est important c’est que cet ANI soit moderne et qu’il propose une évolution du travail pour les TPE et les salariés que nous représentons, a insisté Jean-Christophe Repon, vice-président de l’Union des entreprises de proximité. Nous avons besoin de recruter dans les prochaines années et nous avons besoin de prouver cela dans un accord dynamique pour être attractif. »

Le Medef n’a pas encore refusé cette invitation. Mais en cas d’entente entre l’U2P et une « minorité de syndicats », Hubert Mongon a été formel. Il a clairement affirmé qu’il exercerait « très vraisemblablement [son] droit d’opposition à cet accord de façon à ce que les adhérents du Medef ne soient pas victimes d’une décision qui n’a aucun sens […] et qui ne correspond en rien aux attentes des salariés ». Nul doute qu’entre les deux mouvements patronaux, le Cetu restera un sujet de désaccord.

*À la suite du bilan des entretiens professionnels réalisé au bout de six ans, si l’employeur n’a pas rempli ses obligations, il devra verser à son salarié 3 000 euros de droits à la formation sur son compte personnel.

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Anne Bariet

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