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Personnes vulnérables : de nouveaux critères et le médecin du travail en arbitre

La nouvelle liste des personnes vulnérables pouvant être placées en activité partielle vient d'être publiée. Désormais, le médecin du travail sera sollicité pour donner son avis en cas de désaccord entre le salarié et l'employeur sur la suffisance des mesures de prévention prise pour continuer l'activité.

Personnes vulnérables : de nouveaux critères et le médecin du travail en arbitre
Quand le salarié est en désaccord avec l'employeur sur l'appréciation des mesures de protection renforcées, qui constituent le second critère indispensable, il doit saisir le médecin du travail. © Adobe Stock

Un décret du 10 novembre 2020 publié le lendemain au JO fixe la nouvelle liste des personnes vulnérables face au risque de forme grave d’infection au virus SARS-CoV-2 et pouvant, à ce titre, être placées en activité partielle. Il s’agit d’une nouvelle version, la précédente ayant été en partie retoquée par le Conseil d’État.

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Pour être considérées comme vulnérables, les personnes doivent désormais répondre à deux critères cumulatifs. Le premier concerne son état de santé ou son âge. Le second porte sur les conditions d’exercice de son travail.

Le salarié doit donc être dans l’une de ces situations :

  • être âgé de 65 ans et plus ;
  • avoir des antécédents cardio-vasculaires : hypertension artérielle compliquée (avec complications cardiaques, rénales et vasculo-cérébrales), ATCD d’accident vasculaire cérébral ou de coronaropathie, de chirurgie cardiaque, insuffisance cardiaque stade NYHA III ou IV ;
  • avoir un diabète non équilibré ou présentant des complications ;
  • présenter une pathologie chronique respiratoire susceptible de décompenser lors d’une infection virale : (broncho-pneumopathie obstructive, asthme sévère, fibrose pulmonaire, syndrome d’apnées du sommeil, mucoviscidose notamment) ;
  • présenter une insuffisance rénale chronique dialysée ;
  • être atteint de cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie) ;
  • présenter une obésité (indice de masse corporelle (IMC) > 30 kgm2) ;
  • être atteint d’une immunodépression congénitale ou acquise (médicamenteuse donc chimiothérapie anticancéreuse, traitement immunosuppresseur, biothérapie et/ou corticothérapie à dose immunosuppressive, une infection à VIH non contrôlée ou avec des CD4 < 200/mm3, une immunodépression consécutive à une greffe d’organe solide ou de cellules souches hématopoïétiques, ou bien liée à une hémopathie maligne en cours de traitement) ;
  • être atteint de cirrhose au stade B du score de Child Pugh au moins ;
  • présenter un syndrome drépanocytaire majeur ou ayant un antécédent de splénectomie ;
  • être au troisième trimestre de la grossesse ;
  • être atteint d’une maladie du motoneurone, d’une myasthénie grave, de sclérose en plaques, de la maladie de Parkinson, de paralysie cérébrale, de quadriplégie ou hémiplégie, d’une tumeur maligne primitive cérébrale, d’une maladie cérébelleuse progressive ou d’une maladie rare.

Mais, en plus, le salarié ne doit pas pouvoir ni recourir totalement au télétravail, ni bénéficier de certaines mesures de protection renforcées comme l’isolement du poste de travail, le respect de gestes barrières renforcés, le nettoyage et la désinfection du poste de travail et des surfaces touchées ou encore une adaptation des horaires d’arrivée et de départ. Le décret liste précisément ces mesures, au nombre de six. Ce second critère est nouveau par rapport aux versions précédentes du texte.

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Avis du médecin du travail

Le placement en position d’activité partielle est fait à la demande du salarié sur présentation d’un certificat du médecin. Quand le salarié est en désaccord avec l’employeur sur l’appréciation des mesures de protection renforcées, qui constituent le second critère indispensable, il saisit le médecin du travail « qui se prononce en recourant, le cas échéant, à l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail ». Dans l’attente de cet « avis », le salarié est placé en activité partielle.

Lorsque le salarié a déjà fait l’objet d’un certificat d’isolement entre mai et août derniers, « un nouveau justificatif ne sera pas nécessaire, sous réserve que les possibilités d’exercice de l’activité professionnelle en télétravail ou en présentiel n’ont pas évolué », indique le ministère du Travail dans un communiqué du 11 novembre.

Les nouvelles règles sont applicables depuis le 12 novembre 2020 et jusqu’au 31 décembre 2020.

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« Les pleins pouvoirs » à l’employeur

Un premier décret du 5 mai 2020 avait fixé 11 critères de vulnérabilité. Cette liste avait été revue à la baisse par un décret du 29 août 2020. Le texte avait également exclu du bénéfice de l’activité partielle les salariés partageant le domicile d’une personne vulnérable. Des associations l’avaient contesté et le Conseil d’État l’avait abrogé en partie. Il n’avait pas remis en cause l’exclusion des proches du dispositif mais estimait que le gouvernement aurait dû justifier cette nouvelle liste « par des critères pertinents et cohérents » au regard de la situation sanitaire.

Ce tout nouveau décret intègre à nouveau, dans le dispositif, certains états (troisième mois de grossesse, par exemple) ou maladies (comme la drépanocytose) disparus. Mais il ne satisfait toujours pas certaines associations. C’est le cas de Renaloo, association de patients de maladies rénales, qui regrette, entre autres, que le texte n’impose pas le télétravail « même s’il est possible ». Il faut dire que dans son avis du 29 octobre 2020 sur lequel dit s’être appuyé le gouvernement, le HCSP (Haut conseil de la santé publique) estime que « les personnes à risque de forme grave de covid-19 peuvent reprendre une activité professionnelle sous réserve que leur soit donnée la possibilité de mettre en œuvre les mesures barrières renforcées ».

Renaloo dénonce aussi que les personnes souffrant d’insuffisance rénale chronique non dialysés n’intègrent pas le dispositif. Même critique du côté de France assos santé pour qui, en plus, la nécessaire contestation, en cas de désaccord, auprès du médecin du travail, « risque d’entrainer de nombreux renoncements ». La Ligue contre l’obésité est quant à elle inquiète du nouveau second critère portant sur les mesures de prévention. Selon elle, c’est comme si l’État transférait à l’employeur « les pleins pouvoirs pour décider ou non de la reprise du travail d’une personne souffrant d’obésité ».

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Pauline Chambost

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