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Projet de loi de finances rectificative pour 2012 et fiscalité des entreprises
Le collectif budgétaire a été enregistré à la présidence de l’Assemblée Nationale le 4 juillet 2012. Nous vous proposons ici un éclairage de certaines mesures visant les entreprises, ces dispositions pouvant toutefois être modifiées au cours de la discussion parlementaire.
Les principales mesures fiscales du projet de loi de finances rectificative
Pour compenser la suppression de la retenue à la source applicable aux distributions de dividendes de source française à des organismes de placements collectifs étrangers, du fait de la mise en conformité avec le principe communautaire de liberté de circulation des capitaux, le projet de loi de finances rectificative pour 2012 prévoit la création d’une contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés de 3 % sur les montants distribués par les sociétés et organismes français ou étrangers passibles de l’impôt sur les sociétés (IS) en France.
Cette contribution pénalisera les entreprises qui ne réinvestissent pas le produit de leur activité. La contribution serait due pour les montants distribués dont la mise en paiement interviendra à compter de la date de publication de cette loi.
Cette contribution additionnelle ne s’appliquera pas aux organismes de placements collectifs, aux PME indépendantes, aux sommes non distribuées généralement réinvesties dans l’entreprise et aux montants distribués à des sociétés susceptibles de bénéficier du régime mère-fille et qui détiennent une participation supérieure à 10 % du capital de l’entité distributrice.
Le versement de la contribution exceptionnelle de 5 % sur l’IS, créée par l’article 30 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011, sera anticipé pour les grandes entreprises (plus de 250 millions de chiffre d’affaires). Il sera effectué à la date prévue pour le paiement du dernier acompte d’IS.
L’exonération de cotisations sociales attachée aux heures supplémentaires, prévue par la loi Tepa n° 2011-1223 d’août 2007, est supprimée pour les entreprises de plus de 20 salariés.
La déduction des provisions pour investissement prévue à l’article 237 bis A du Code général des impôts (CGI) est supprimée.
Pour les exercices clos à compter du 4 juillet 2012, les abandons de créances à caractère financier, par opposition aux abandons de créances à caractère commercial, deviendraient non déductibles du bénéfice imposable de l’entreprise soumise à l’IS ou à l’impôt sur le revenu (IR).
Le report des déficits plus encadré
De même, le collectif budgétaire devrait limiter les possibilités des sociétés soumises à l’IS d’utiliser les déficits fiscaux reportables.
Cette mesure est déclinée sur deux axes pour les exercices clos à compter du 4 juillet 2012. Le premier consiste à instaurer un durcissement des conditions d’obtention de l’agrément autorisant le transfert des déficits, en cas de restructuration, au profit de la société absorbante ou bénéficiaire des apports. Elle consiste à exiger que l’activité à l’origine des déficits dont le transfert est sollicité n’ait pas fait l’objet, au niveau de la société absorbée ou apporteuse, de changement significatif notamment en termes de clientèle, d’emploi, de moyens d’exploitation effectivement mis en œuvre, de nature et de volume d’activité pendant la période durant laquelle ces déficits ont été constatés.
Dans le cadre d’un groupe intégré, l’octroi de l’agrément sera, en outre, conditionné à la poursuite pendant trois par toutes les sociétés de l’ancien groupe qui deviennent membres du nouveau groupe de l’activité à l’origine des déficits dont le transfert est demandé.
Le second axe consiste à étendre les possibilités de déchéance des déficits antérieurs provoquée par un changement d’activité réelle de la société, traitée comme une cessation d’entreprise entraînant elle-même la perte des déficits antérieurs, en donnant une définition plus précise mais aussi plus large du changement d’activité réelle précité.
Celle-ci interviendra en cas d’adjonction ou de perte d’activité se traduisant par une variation de plus de 50 % du chiffre d’affaires ou de l’emploi et de l’actif immobilisé à la hausse (adjonction d’activité) ou à la baisse (perte d’activité).
De même, sont traitées comme une cessation d’entreprise les disparitions des moyens de production nécessaires à la poursuite de l’exploitation pendant une durée de plus de douze mois, sauf en cas de force majeure, ou lorsque cette disparition est suivie d’une cession de la majorité des droits sociaux.
Ces nouvelles dispositions ne vont pas faciliter les restructurations, pourtant essentielles en période de crise, soit parce qu’elles pénalisent le succès pour certaines d’entre elles (adjonction d’activité), soit parce qu’elles sanctionnent des situations de redressement (disparition temporaire des moyens de production) ou des situations compromises (variation à la baisse de 50 % du chiffres d’affaires en cas de transfert d’activité). En outre, ce seront, bien sûr, les PME qui auront du mal à appliquer ces dispositions, les grands groupes ayant les moyens de les connaître et donc de les appliquer correctement.
Plus de contraintes sur les entreprises
Une nouvelle mesure vise à instaurer une égalité du traitement fiscal applicable aux opérations visant à reconstituer la situation nette des filiales, quelle que soit la nature de l’opération, apport, subvention ou abandon de créance. Le supplément d’apport sera donc imposable comme une subvention ou un abandon de créances lorsqu’il permet de combler les pertes de la société et qu’il est rémunéré par des titres dont la valeur réelle est inférieure à la valeur des biens apportés.
Par ailleurs, la loi de finances rectificative pour 2012 prévoit de lutter contre les schémas de désinvestissement dits « coquillards ». Les déductions abusives ne seront plus déductibles au taux commun de l’IS, à compter de la date de la présentation de la mesure en Conseil des ministres.
Les taux des contributions sociales salariale et patronale appliquées aux stock-options consenties et aux actions gratuites attribuées à compter du 30 septembre 2012 sont révisés à la hausse passant de 8 à 10 % pour la première et de 14 à 30 % pour la seconde.
Le forfait social applicable à l’épargne salariale est également révisé à la hausse et passe de 8 à 20 %. Ce taux sera applicable aux rémunérations versées à compter du 1er septembre 2012.
Les conditions d’application de l’article 209 B du CGI visant à lutter contre les transferts de bénéfices vers les pays à fiscalité privilégiée en permettant d’imposer en France des résultats réalisés par des entités étrangères contrôlées par des sociétés françaises sont renforcées pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2012. Ainsi, la charge de la preuve est renversée pour l’application de la clause de sauvegarde permettant d’échapper à l’article 209 B en cas d’activité locale réelle. C’est désormais à l’entité de démontrer que son activité est principalement exercée sur place. Cette clause de sauvegarde ne serait, par ailleurs, plus applicable pour les entités établies dans un Etat ou un territoire dit non coopératif.
Ces différentes mesures augmentent les contraintes pesant sur les entreprises, alors que la souplesse serait plus que jamais recommandée.
Ce projet de loi de finances rectificative sera examiné en commission des finances de l’Assemblée Nationale le 11 juillet 2012 et en séance publique à compter du 16 juillet 2012.
Vincent Chaulin, avocat à la Cour, spécialiste en droit fiscal
Raphaëlle Wulfman, Licence Droit Gestion, Université Paris Dauphine
vincent.chaulin@chaulin-avocat.com
www.chaulin-avocat.com
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