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Risque routier professionnel : les comportements des actifs se dégradent depuis 2015

Utilisation accrue du smartphone, vitesse excessive plus fréquente, somnolence et fatigue au volant davantage déclarées… Les comportements des actifs sur la route se dégradent depuis 2015, alerte le groupe d’assurance MMA dans une étude publiée le 27 mai. Première cause d’accident mortel au travail, le risque routier professionnel apparait « plus que jamais sous-estimé ».

Risque routier professionnel : les comportements des actifs se dégradent depuis 2015
Au premier rang des préoccupations : l’utilisation du smartphone au volant, en nette augmentation depuis 10 ans. © Getty Image

« Malheureusement, nous ne constatons aucune amélioration en une décennie, déplore Guillaume Wirth, en charge de la prévention des risques routiers chez MMA, dans une étude* sur le risque routier professionnel réalisée par l’Ifop pour MMA publiée le 27 mai (étude complète), à l’occasion des journées de la sécurité routière au travail du 27 au 31 mai 2024. Au contraire, les comportements se dégradent et trop peu d’actions de prévention sont mises en place alors que le risque routier demeure la première cause de mortalité au travail. Il est temps de réagir. »

Au premier rang des préoccupations : l’utilisation du smartphone au volant, en nette augmentation depuis 10 ans. En 2024, 80 % des actifs déclarent recevoir des appels au volant lorsqu’ils travaillent et 74 % en passer. Soit respectivement, + 7 points et + 14 points depuis 2015. Plus de la moitié des actifs interrogés lisent par ailleurs leurs SMS au volant (57 %, + 4 points depuis 2015) et 48 % en envoient (+ 6 points).

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25 % des actifs considèrent leur voiture comme un « deuxième bureau »

Les autres usages du téléphone, comme la consultation d’une application, d’un site, d’un mail ou l’utilisation des réseaux sociaux au volant progressent également depuis 2015, même s’ils sont encore « effectués dans une moindre mesure », précisent les auteurs de l’étude. Un usage « ordinateuresque » du téléphone portable qui interpelle, à l’heure où 25 % des actifs qui effectuent des déplacements professionnels au moins une fois par jour considèrent aujourd’hui leurs véhicules connectés comme un « deuxième bureau », selon l’étude**.

« Si on considère sa voiture comme un bureau, alors on ne considère pas son véhicule comme un lieu de déconnexion, s’inquiète Guillaume Wirth. Or, nous savons que les distracteurs au volant sont les principales causes d’accidents mortels sur la route. » Une tendance à l’usage global du smartphone au volant, couplée à celle d’une connectivité accrue des voitures modernes, que le préventeur a vu « croitre d’année en année ». « On a besoin d’une vraie sensibilisation sur ce sujet », estime-t-il.

Autrement, de plus en plus d’actifs roulent trop vite (41 % disent rouler souvent ou parfois au-dessus de la vitesse autorisée, + 5 points par rapport à 2015) et en étant fatigués (80 % déclarent avoir déjà conduit en étant fatigué sur un trajet professionnel, + 2 points par rapport à 2015). Seul point positif (dans une certaine mesure) : la stabilité de la proportion d’actifs déclarant avoir déjà conduit en ayant consommé plus de deux verres d’alcool (15 % contre 16 % en 2015).

Seuls 28 % des actifs savent que le risque routier est la première cause d’accidents mortels au travail

Des résultats « alarmants » que Guillaume Wirth explique « difficilement ». « Tous les outils sont là, les actions de sensibilisation sont plutôt simples à mettre en œuvre…, égrène-t-il. Je pense que le sujet est vraiment la méconnaissance, le manque de prise de conscience du risque routier professionnel par les dirigeants et décideurs de l’entreprise. »

Preuve que le message n’est pas assez diffusé ou ne passe pas : seuls 28 % des actifs savent que le risque routier est la première cause d’accidents mortels au travail (- 7 points par rapport à 2015). Pour rappel, selon l’observatoire interministériel de la sécurité routière, 485 personnes ont été tuées lors d’un déplacement lié au travail en 2022 (71 % lors d’un trajet domicile-travail, 29 % lors d’un trajet réalisé dans l’exercice d’une mission professionnelle).

La faute notamment, à des actions de prévention de moins en moins nombreuses ? 42 % des actifs déclarent que les actions mises en place par leur entreprise en termes de prévention des risques routiers sont inexistantes (+ 3 points par rapport à 2015), 35 % rares (+ 3 points) et 23 % régulières (- 6 points). 32 % aimeraient pourtant la mise en place de formations de sensibilisation aux risques routiers, 30 % l’organisation d’une journée sécurité routière, 27 % l’instauration d’une charte de bonnes pratiques au volant et 23 % la diffusion de messages de sensibilisation aux risques routiers ou d’outils pédagogiques sur la conduite.

« Le risque routier professionnel est plus que jamais sous-estimé », avancent les auteurs de l’étude. « Il faut continuer de sensibiliser les dirigeants et décideurs de l’entreprise pour qu’ils aient conscience du risque routier professionnel pour ensuite partager des actions de prévention, insiste de son côté Guillaume Wirth. Les attentes des actifs sont très fortes. »

Le gouvernement propose en ligne des outils de sensibilisation au risque routier à destination des entreprises et appelle les dirigeants à signer la « charte des 7 engagements + pour une route plus sûre ». Lancée en 2016, cette charte réunit à ce jour 3 000 employeurs dont Météo-France, Orange, Total ou Danone (liste des signataires). Le gouvernement met à leur disposition des ressources téléchargeables. MMA propose également des outils pour agir (dont un Memo DUER).

 

*Étude réalisée par l’Ifop pour l’assureur MMA auprès d’un échantillon de 1 023 actifs hors professionnels de la route effectuant des trajets professionnels au moins une fois par mois, extraites d’un échantillon de 3 126 personnes représentatif de la population active occupée française selon la méthode des quotas. Questionnaire auto-administré en ligne du 8 au 22 avril 2024.

** Les répondants ont répondu à la question suivante (nouveauté de l’étude annuelle pour 2024) : « Les véhicules sont de plus en plus connectés, équipés de fonctionnalités de bord toujours plus sophistiquées. Vous, personnellement, diriez-vous que le véhicule que vous utilisez pour vos déplacements professionnels ne demeure qu’un moyen de déplacement ou constitue un deuxième bureau ? ».

Matthieu Barry

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