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Comment trouver des arguments ?
En matière de vente, il existe de nombreux types d'argumentaires, chacun adapté à un contexte différent : la prospection téléphonique, le rendez-vous en clientèle, la démonstration d'un produit. Mais aussi la présentation d'un bilan à des investisseurs, la défense d'un projet dans un colloque, un discours politique, une situation d'embauche, qui, après tout, sont aussi des situations de vente. A bien y regarder, on argumente en permanence.
Bien que tout le monde s’accorde à reconnaître son importance, l’argumentaire est presque toujours bâclé. Il est bâclé par les dirigeants et managers qui, tout en ayant le sentiment de produire un effort louable et d’y consacrer un temps précieux, ne mesurent pas toujours l’impact du mot juste pour la valorisation de leur offre. Il est également sous-utilisé par les commerciaux qui trouvent bien suffisant de le lire rapidement et de retenir deux ou trois idées fortes. Résultat : de concepts mal digérés en expressions inadaptées, de réponses approximatives en contradictions, le discours s’effiloche, perd de son tranchant, de sa crédibilité.
Oui, mais comment trouver des arguments? En faisant tourner la machine à argumenter.
Dans le moule, on introduit les ingrédients : ce sont les enjeux. On définit des enjeux respectifs pour le secteur, pour l’entreprise, pour le service, et pour l’interlocuteur. Par exemple, un enjeu pour le secteur peut être lié à une nouvelle réglementation, qui introduit des contraintes de fabrication donnant une chance supplémentaire à votre solution d’être bien reçue. Un enjeu pour le service (auquel appartient votre interlocuteur) peut être lié au rachat de l’entreprise par un grand groupe qui a parlé de restructurations. Connaître les enjeux implique une bonne connaissance sur le sujet. Vous pouvez trouver bon nombre d’information sur le web ou faire appel à un cabinet spécialisé dans la veille opérationnelle.
Les ingrédients étant introduits, on fait tourner le moteur en se posant cette question : étant donné les enjeux, comment notre offre peut-elle permettre au client :
- d’augmenter son CA ?
- de diminuer ses dépenses ?
- de limiter ses risques ?
- d’élargir son horizon (gagner en liberté) ?
La machine se met alors à produire des arguments en quantité. Ne retenez que ceux qui passent au travers du filtre suivant, qui est in fine celui de l’acheteur :
- l’argument apporte de la crédibilité à votre offre ou à vous-même ;
- il apporte la preuve que l’offre valorise l’entreprise de l’acheteur ;
- il prouve qu’il faut acheter maintenant ; plus tard, il sera trop tard.
Le déroulé des arguments initial suit un ordre logique.
Imaginons un candidat au cours d’un entretien de recrutement pour un poste de commercial.
Il commence par des arguments génériques, vrais dans tous les cas de figure. Par exemple : « Je suis un bon commercial, j’ai acquis des techniques de vente solides que j’ai pu expérimenter avec succès ».
Puis il présente des arguments relatifs, c’est-à-dire valables essentiellement en comparaison de la concurrence. « J’étais le meilleur commercial de ma précédente société parce que je réalisais le plus gros chiffre d’affaires de l’équipe depuis plusieurs mois ». Le candidat sait que cet argument ne pourra pas être avancé par tous les autres candidats au poste.
Enfin, il présente des arguments personnalisés, qui impliquent l’interlocuteur : « En tant que commercial de votre entreprise, je m’engage à réaliser un objectif personnel de 1 M€ par an ». La plupart des commerciaux à qui je fais passer des entretiens de recrutement sont totalement incapables de s’engager sur quelque chiffre que ce soit, et quand je leur en fais la remarque, ils répondent généralement : « Ça dépend de ce que vous pensez que je peux faire ».
Par ailleurs, dans une argumentation il est souhaitable de se ménager des périodes de relative passivité (par exemple en posant une question de forme à un interlocuteur) qu’on mettra à profit pour souffler, mais aussi observer et éventuellement prendre des décisions pour la suite de l’argumentation.
A une objection il ne faut jamais répondre : « Vous avez tort », mais « C’est exact », puis reformuler ou recadrer. Par exemple, si votre interlocuteur vous reproche : « Vous allez détruire l’équilibre au sein de l’entreprise », vous pourrez répondre : « En effet, notre offre vous permet de trouver de nouveaux équilibrages, pour plus d’efficacité ».
D’autre part, il faut toujours chercher à grouper les objections avant d’y répondre : « Est-ce votre seule objection ? En avez-vous d’autres ? Si je réponds correctement à votre objection, j’en déduirai que vous serez convaincu par notre offre. ». Cela permet d’éviter l’effet « fusillade » où les objections s’enchaînent aux parades sans discontinuer.
Si l’objection est fausse, si c’est un mensonge, il faut nuancer le propos de l’interlocuteur sans le contredire frontalement : « Vos jouets sont dangereux » – « Si en effet ils étaient dangereux, nous les retirerions immédiatement. Le problème n’est pas la sécurité, que nous vérifions soigneusement chaque année, mais bien la fiscalité qui alourdit le secteur et nous empêche d’investir pour suivre les normes édictées par Bruxelles…. ».
Si l’objection est très agressive ou sans valeur (on parle alors de « fausses barbes »), il faut demander des précisions, puis contre-attaquer sur des faits précis. Dans tous les cas, ne suivez pas le conseil de Helbert Hubbard : « Si vous ne pouvez pas répondre à l’argument de quelqu’un, tout n’est pas perdu. Vous pouvez encore l’injurier. ». Parfois plus difficile à dire qu’à faire…
Philippe Guihéneuc
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